Un technicien peut être désigné par le juge-commissaire pour rechercher la responsabilité d’un ancien dirigeant.
En application de l’article L. 621-9 du Code de commerce (1), le juge-commissaire peut nommer un technicien, « en vue d’une mission qu’il détermine ».
Sur le fondement de ce texte, la question s’est posée de savoir si un liquidateur qui avait assigné l’ancien dirigeant en responsabilité pour insuffisance d’actif, pouvait demander, postérieurement, au juge-commissaire, par voie de requête, la désignation d’un expert-comptable avec pour mission de déterminer la date de cessation des paiements et examiner les conditions dans lesquelles s’était déroulée l’exploitation de la société débitrice.
Pour la Cour d’appel, une telle demande devait être rejetée, au motif que le pouvoir de désignation conféré au juge-commissaire cessait dès lors qu’une action en responsabilité pour insuffisance d’actif avait déjà été engagée et était en cours devant le tribunal.
Pour justifier l’application de ce critère qui n’est pourtant pas prévu par le Code de commerce, la Cour d’appel retient que le rapport du technicien n’était « plus destiné à l’information du mandataire et tend[ait] à sauver une procédure » pour insuffisance d’actif à l’encontre de l’ancien dirigeant, « manifestement vouée à l’échec en obtenant à bon compte les éléments de preuve qui font défaut ».
Adoptant une approche restrictive du pouvoir de désignation du juge-commissaire, la Cour d’appel a estimé qu’une « telle pratique », alors que la procédure pour insuffisance d’actif est en cours, « n’est pas loyale et détourne les dispositions du texte précité de leur objectif d’information ».
Cette décision est infirmée par la Cour de cassation qui, dans son arrêt (2) rendu le 13 septembre 2016 (publié au bulletin), considère que « l’exercice par le liquidateur d’une action en responsabilité civile pour insuffisance d’actif ne prive pas le juge-commissaire de son pouvoir de désigner un technicien en vue d’une mission qu’il détermine ».
En revanche, comme la Cour d’appel, la Cour de cassation juge que l’ancien dirigeant est bien recevable à exercer un recours contre l’ordonnance du juge-commissaire désignant le technicien, étant précisé que le dirigeant doit être associé aux opérations menées par ce dernier, sans pour autant que le technicien ne soit « tenu de procéder à un échange contradictoire sur les éléments qu’il avait réunis, ni de communiquer ses conclusions avant le dépôt de son rapport » (3).
Pierre-Yves Fagot
Carine Dos Santos
Lexing Droit Entreprise
(1) C. com., art. L621-9
(2) Cass. com., 13-9-2016, n°15-11.174, Liquidateur c./ M. X.
(3) Cass. com., 22-3-2016, n°14-19.915 Sté Team 41 et M. X.