Le financement participatif a fait l’objet d’un décret, paru en novembre dernier, venant préciser son cadre juridique.
Le financement participatif, appelé « crowdfunding » par les anglo-saxons ou encore « sociofinancement » par les francophones nord-américains, est un mécanisme permettant de collecter des fonds auprès d’un large public.
Le créateur ou entrepreneur qui ne possède pas tous les fonds nécessaires au lancement de l’activité, et qui ne souhaite ou ne veut souscrire un prêt bancaire, peut solliciter d’autres financeurs (particuliers ou entreprises) au soutien de son projet.
Ce mode de financement, dit « désintermédié », a connu un vif succès en France.
Les montants levés par ce mécanisme dans l’hexagone sont en constante augmentation ; le record de près de 300 millions d’euros ayant été atteint en 2015 et les chiffres pour 2016 s’annoncent tout aussi prometteurs.
A l’origine orienté vers le financement de projets culturels et de divertissement (cinéma, musique, spectacle vivant, etc.), le crowdfunding s’est développé pour tout type de financement et d’investissement (immobilier, presse, association, etc.).
Le réseau internet a permis l’émancipation rapide de ce mode de financement par la collecte de fonds, réalisée par l’intermédiaire de plateformes internet, permettant à un ensemble de contributeurs de choisir de financer directement des projets définis.
Les contributions peuvent se faire, selon le choix de l’initiateur du projet, par donation (« donation crowdfunding »), prêt (« crowdlendind ») avec ou sans intérêt, ou encore par une prise de participation aux fonds propres de la société créée pour le projet (« crowdequity »).
Le financement participatif a progressivement été normalisé en France par l’ordonnance 2014-559 du 30 mai 2014, introduisant dans le Code monétaire et financier les métiers d’intermédiaire en financement participatif (1) et de conseiller en investissement participatif (2), puis par son décret d’application n°2014-1053 du 16 septembre 2014.
Le nouveau décret n°2016-1453 du 28 octobre 2016 relatif aux titres et aux prêts proposés dans le cadre du financement participatif est venu préciser le cadre légal et réglementaire du mécanisme (1).
Par ce décret, le gouvernement a notamment procédé aux mesures suivantes :
- réhaussement du plafond des prêts, passant de 4 000 euros à 5 000 euros pour les prêts sans intérêts et de 1 000 euros à 2 000 euros pour les prêts avec intérêts ;
- réhaussement du plafond des offres admises sur les plateformes des conseillers en investissement participatif ;
- élargissement du champ des titres financiers que les conseillers en investissement peuvent proposer à leurs clients (action de préférence, obligation convertible en action, titres participatifs sous condition) ;
- création de « minibons » en contrepartie du crédit accordé.
Ainsi, un prêteur pourra, désormais, mettre à disposition des créateurs/entrepreneurs, via une plateforme qui n’aura pas opté pour le statut de conseiller en investissement participatif, 2 000 euros par projet si ce prêt est rémunéré ou 5 000 euros par projet si ce prêt est non rémunéré.
Le seuil d’emprunt, initialement prévu à 1 million d’euros, est relevé à 2,5 millions d’euros pour les plateformes ayant opté pour le statut de conseiller en investissement participatif.
Enfin, le décret vient officialiser l’ordonnance n°2016-520 du 28 avril 2016 en instaurant la mise en place de bons de caisse spécifique appelés « minibons » pour lesquels les modalités de cession seront simplifiées, afin de faciliter la circulation des titres, et dont la détention de ces instruments ne sera plus anonyme, en vue d’éviter le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.
Les bons de caisse sont des titres remis par une entreprise en échange d’un crédit qui lui est accordé.
Ayant constaté que le plafond légal pour les prêts rémunérés était couramment contourné par les plateformes de crowdlending par l’émission de bons de caisse, le gouvernement a voulu créer des « minibons » lesquels pourront, contrairement aux bons de caisse classiques, être échangés sur les plateformes internet de financement participatif.
Le montant maximal des offres de minibons d’un même émetteur est de 2,5 millions d’euros sur une période d’une année à compter de la date de la première émission.
Les statistiques ainsi qu’une réglementation favorable au financement participatif (rehaussement des plafonds, création d’un nouvel instrument financier) laissent donc présager de beaux jours pour ce mode de financement de projet alternatif aux crédits bancaires.
Pierre-Yves Fagot
Maxime Guinot
Lexing Droit Entreprise
(1) C. mon. fin., art. L. 548-2.
(2) C. mon. fin., art. L.547-1.