Aux frontières de la technologie et de la création, le design interactif est au cœur de la stratégie des entreprises.
Innovation et différenciation par le design interactif
Cause et conséquence de la transformation numérique, les entreprises centrent leurs activités sur l’innovation technologique. Elles doivent créer des produits et services toujours plus performants afin de répondre aux besoins et aux attentes des utilisateurs.
Néanmoins, au cœur de l’innovation, le design constitue un critère d’achat au même titre que la technologie qu’il contient. Il joue un rôle clé dans la création de valeur ajoutée et la capacité de différenciation des entreprises. Il est donc un élément moteur de l’innovation et de la création et, partant, un véritable levier de croissance économique.
Dans ces conditions, le design ne se limite plus à l’apparence d’un produit ou d’un emballage. Il s’interroge sur les rapports entre les personnes et les produits ou services qui leur sont offerts. Il s’inscrit dans l’évolution des interactions homme-machine. Son objectif est de répondre aux besoins évolutifs des utilisateurs, de créer de nouvelles expériences et de révolutionner les usages.
Le design s’adresse à tous les secteurs d’activité. Il s’inscrit dans toutes les étapes de conception, fabrication et commercialisation d’un produit ou d’un service.
Les entreprises doivent donc placer – ou replacer – le design au cœur de leur démarche, particulièrement le design interactif.
Conception de produits et services numériques par le design interactif
L’association des designers interactifs définit le design interactif comme « l’activité créatrice dédiée à la conception des produits et services numériques ». Il consiste à imaginer les interactions entre les personnes et les produits et services, dans leurs dimensions numérique et physique.
En effet, selon l’association professionnelle américaine IxDA (Interaction Design Association), le designer d’interaction s’efforce de créer des relations signifiantes entre les personnes et les produits et services qu’elles utilisent. Ces interactions s’expriment dans le comportement du produit ou du service, autour d’un objet, d’une interface ou d’un environnement numérique.
Aussi, le design interactif s’attache naturellement aux objets connectés mais également aux applications, à l’architecture de l’information et à leur ergonomie. Il s’intéresse également à l’expérience utilisateur, aux qualités émotionnelles et aux expériences sensorielles portées par un produit ou un service. Il conduit à adopter le point de vue de l’utilisateur, privilégiant la dimension émotionnelle et les interactions intuitives, sans effort. Il s’agit d’humaniser la technologie, au point de la rendre invisible pour l’utilisateur.
Enjeux et perspectives juridiques du design interactif
Le design interactif transcende les frontières de la technologie et de la création. Dans ce cadre, il doit faire face à de nombreuses contraintes, mais également à d’importants enjeux juridiques.
Le design interactif doit se voir appliquer les règles spécifiques au secteur dans lequel il intervient. En effet, s’adressant à tous les secteurs d’activité, des objets connectés et services numériques peuvent être utilisés notamment dans les secteurs de la santé, des transports, des banques et assurances, soumis à des réglementations strictes. Il doit également être encadré par le droit de la responsabilité civile et pénale.
Par ailleurs, dès lors qu’il est centré sur l’utilisateur, le design interactif peut soulever des problématiques en termes de protection de la vie privée et de protection des données personnelles, ainsi qu’en droit de la consommation.
Enfin, s’agissant de sa protection, le design interactif tient compte de considérations à la fois techniques et ornementales, parfois indissociables. Le produit ou service en résultant est donc susceptible de revendiquer des régimes de protection distincts mais souvent contradictoires.
A titre d’exemple, si le régime de protection des dessins et modèles apparait comme le mode de protection naturel du design, il convient de ne pas oublier qu’une telle protection ne pourra porter sur les programmes d’ordinateur. Elle sera également écartée en présence de modèles d’interconnexion ou de modèles dont les caractéristiques sont exclusivement imposées par la fonction technique du produit.
A l’inverse, si l’aspect interactif peut conduire à un dépôt de brevet, ce régime de protection exclut expressément les créations esthétiques.
Dès lors, tout produit ou service intégrant du design interactif doit faire l’objet d’une réflexion globalisée et d’une stratégie de protection adaptée (1).
Virginie Brunot
Justine Ribaucourt
Lexing Droit Propriété industrielle
(1) Pour une première étude relative à la protection des objets connectés : « Objets connectés et propriété intellectuelle : L’Ido au secours de la propriété intellectuelle et réciproquement : les clés d’une interdépendance réussie ? » , Virginie Brunot, in La propriété intellectuelle & la transformation numérique de l’économie, Regards d’experts, 10-9-2015