La Cour de cassation vient confirmer que la société par actions simplifiée est la société-contrat par excellence.
Le Code de commerce contient très peu de dispositions spécifiques aux sociétés par actions simplifiée (SAS).
Cette forme sociale donne la part belle à la liberté contractuelle des associés.
L’arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation en date du 25 janvier 2017 est venu réaffirmer l’importance de la volonté des associés dans les sociétés par actions simplifiée, matérialisée dans les statuts.
En l’espèce, un actionnaire majoritaire et président du conseil d’administration d’une société anonyme (le cédant) avait conclu, en 2005, un protocole d’accord portant sur la cession de la quasi-totalité de sa participation capitalistique à un tiers (le cessionnaire).
Cet acte prévoyait que le prix de cession des actions serait diminué en cas de baisse du chiffre d’affaires au cours des exercices 2005 et 2006 dans la mesure où l’actionnaire majoritaire demeurait administrateur.
Courant avril 2005, l’assemblée générale des actionnaires de la société anonyme a décidé de la transformation de cette dernière en société par actions simplifiée.
Le cédant, soutenant que la société et le tiers cessionnaire n’avaient pas respecté leurs engagements contractuels, les a assignés en paiement. Les défenderesses ont, alors, sollicité reconventionnellement que la clause de réduction du prix prévue dans le protocole de cession soit appliquée.
Les juges du fond ont fait droit à la demande des défenderesses aux motifs que si les statuts de la société, sous sa nouvelle forme sociale (SAS), ne faisaient pas mention de l’existence d’un conseil d’administration, les documents produits aux débats attestaient tous du maintien de cet organe de gouvernance au sein de la société après sa transformation.
De ce constat, la Cour d’appel a donc considéré que le cédant n’avait pas perdu sa qualité d’administrateur consécutivement à la transformation de la société.
Sur le fondement conjugué des articles L.227-1 et L.227-5 du Code de commerce, la Chambre commerciale de la Cour de cassation, par un arrêt du 25 janvier 2017, n’a pas retenu cette analyse et a cassé l’arrêt d’appel aux motifs que « seuls les statuts de la société par actions simplifiée fixent les conditions dans lesquelles la société est dirigée » (1).
A bien y réfléchir, cette cassation par la Haute Cour était prévisible.
Le régime des sociétés par actions simplifiée est pour l’essentiel défini dans les statuts convenus librement entre les associés.
Dans la mesure où elles sont compatibles avec le régime légal particulier prévu pour les sociétés par actions simplifiée, les règles concernant les sociétés anonymes sont applicables à la société par actions simplifiée (1).
Ainsi, les règles relatives à la responsabilité des dirigeants d’une société par action simplifiée suivent celles qui sont applicables aux administrateurs de la société anonyme.
Sont considérées comme incompatibles, les règles relatives au capital minimum de la société anonyme, les règles concernant les organes de direction, d’administration et l’assemblée générale des sociétés anonymes, la transformation d’une société anonyme en une autre forme sociale et la déclaration annuelle du total des droits de vote dans une société anonyme.
Le Code de commerce précise que les attributions du conseil d’administration ou de son président sont exercées par le président de la société par actions simplifiée ou celui ou ceux de ses dirigeants que les statuts désignent à cet effet.
Si le conseil d’administration est un organe légal impératif pour une SA, cet organe est facultatif pour une SAS.
L’article L227-5 du Code de commerce renvoie aux statuts la fixation des conditions dans lesquelles la société par actions simplifiée est dirigée.
L’article L.227-6 du même code exige uniquement qu’un président représente la société vis-à-vis des tiers.
Les statuts d’une SAS peuvent donc prévoir la création de tout organe collégial de direction, quelle que soit sa dénomination et son organisation et le mode de désignation de ses membres pour autant que cela ne contrevienne pas aux principes de base de la bonne gouvernance.
Toutefois, la liberté n’est pas entière et il ne peut être ni désigner deux présidents ni les déclarer en tant que tels au registre du commerce et des sociétés en raison de l’impératif de protection des tiers (2).
En conclusion, cet arrêt de la Cour de cassation donne l’occasion de rappeler la grande souplesse d’organisation offerte par les SAS. Seuls les statuts peuvent fonder l’existence d’un organe social dans ce type de société par actions ; les autres actes, tels que par exemple un règlement intérieur ou un pacte d’associés, sont inopérants.
Pierre-Yves Fagot
Maxime Guinot
Lexing Droit Entreprise
(1) C. com., art. L.227-1
(2) CCRCS, Avis n°2013-027, 4-10-2013