Le spoofing, technique de THF, consiste à charger le carnet pour ensuite retirer ses ordres avant exécution. La stratégie est d’attirer le marché en gonflant le volume du carnet d’ordres, sans aucune réalité économique derrière.
Le spoofing : délit de manipulation des cours
Cette technique ne connait pas de définition légale mais se rapproche du délit de manipulation du cours qui est défini à l’article 743-1 du Règlement de l’Autorité des marchés financiers (AMF) (1).
Cette infraction consiste à émettre des ordres :
- qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses en ce qui concerne la demande ou le prix des quotas d’émission ;
- qui fixent le prix de clôture des enchères ou le cours des quotas d’émission à un niveau anormal ou artificiel (sauf à ce que la personne qui a effectué la transaction ou émis l’ordre établisse que les raisons qui l’ont poussée à le faire sont légitimes) ;
- qui recourent à des procédés fictifs ou autres formes de tromperies.
Le spoofing : caractérisations du délit
Mais c’est plus particulièrement l’article 743-2 du même règlement qui semble se pencher sur le cas du trading haute fréquence en introduisant un certain nombre de dispositions relatives à la quantité d’ordres émis et à et aux écarts temporels minimes entre les ordres.
Cet article dispose ainsi que pour apprécier les pratiques listées au 743-1, il convient notamment de prendre en compte :
- l’importance de la part du volume quotidien des transactions représentées par les ordres émis ;
- la réalisation d’opérations n’entrainant aucun changement de propriétaires ;
- la concentration des ordres émis ou des opérations effectuées sur un bref laps de temps.
Spoofing : difficile à détecter
Les décisions prises par l’AMF sur le fondement de ces articles sont rares car il s’agit avant tout d’une infraction difficile à détecter.
Il est néanmoins possible de citer la décision du 4 décembre 2015 rendue par la Commission des sanctions de l’AMF réunie en formation plénière (2) qui a condamné deux sociétés, respectivement entreprise de marché et opérateur sur le marché, à une amende de cinq millions d’euros pour manipulation des cours.
La première avait été condamnée sur le fondement de l’article 512-3 du Règlement de l’AMF pour manque d’impartialité, ayant accordé des avantages discrétionnaires à la seconde, permettant à celle-ci d’augmenter le nombre d’ordres sans encourir de surfacturation.
Contre la seconde, l’AMF a retenu deux types de manipulations de cours :
- d’une part, le comportement manipulatoire a été caractérisé par l’émission massive d’ordres qui donnent ou sont susceptibles de donner des indications fausses ou trompeuses sur l’offre, la demande ou le cours des instruments financiers ;
- d’autre part, la manipulation de cours a également été caractérisée par la position dominante que s’est assurée la société sur le marché des titres objets de l’enquête sur les différentes plateformes « en raison du très grand nombre d’interventions et du volume d’interventions qu’elle a effectuées dans le carnet.
Marie-Adélaïde de Montlivault-Jacquot
Pierre Guynot de Boismenu
Lexing Contentieux Informatique
(1) Règlement de l’Autorité des marchés financiers (AMF)
(2) Décision SAN-2015-20 de la Commission des sanctions de l’AMF du 4-12-2015 à l’égard des sociétés Euronext Paris SA et Virtu Financial Europe Ltd.