Les séniors recourent de plus en plus souvent aux crédits à la consommation pour compenser leur baisse de revenus.
Dans ce contexte, la presse s’est faite l’écho de cas où certains seniors se sont vus refuser un crédit à la consommation en raison vraisemblablement de leur âge. Ces cas médiatisés, avec pour toile de fond le spectre de la discrimination liée à l’âge, posent inévitablement la question de la conciliation entre d’une part, le pouvoir discrétionnaire des établissements de crédit de gérer leurs risques en définissant leur politique de risques, et d’autre part, le recours croissant des seniors aux crédits dans une société où ces derniers représentent une portion de plus en plus importante avec les risques de défaillance qui leur sont liés.
Dans ce contexte, une question écrite a été posée par Monsieur Bernard Carayon à la secrétaire d’Etat chargée des Aînés, pour savoir notamment si un refus de crédit fondé sur le seul motif de l’âge constitue « un début de discrimination ». La réponse ministérielle à cette question précise qu’« il n’apparaît pas que le refus de crédit au motif de l’âge du souscripteur soit une forme de discrimination ». Si cette réponse semble admettre la possibilité pour un établissement de crédit de refuser un crédit à une personne en raison de son âge, elle conditionne néanmoins cette absence de discrimination au respect du principe de proportionnalité. En effet, le refus de crédit au regard de l’âge du demandeur selon cette réponse ministérielle ne serait pas une discrimination si ce refus « est proportionné par rapport aux risques et au montant du prêt sollicité ».
Cette réponse ministérielle s’inscrit dans la lignée de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’Homme qui précise qu’une différence de traitement constitue une discrimination au sens de l’article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, si elle « manque de justification objective et raisonnable », c’est-à-dire si elle ne poursuit pas un « but légitime » ou s’il n’y a pas de « rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé ».
Elle se trouve également en parfaite cohérence avec la proposition de directive relative à la mise en œuvre du principe d’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de religion ou de convictions, de handicap, d’âge ou d’orientation sexuelle qui précise que :
- les Etats membres peuvent prévoir que les différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont justifiées par un objectif légitime et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires ;
- elle n’exclut pas la fixation d’un âge spécifique pour accéder à certains biens ou services et notamment lorsque l’utilisation de l’âge constitue un facteur déterminant pour l’évaluation du risque comme en matière de fourniture de services financiers.
Néanmoins, si cette réponse ministérielle doit être saluée en ce qu’elle prône un équilibre entre les intérêts des établissements de crédit et des seniors, elle ne dispose pas de la force juridique contraignante que pourrait avoir une loi qui prévoirait expressément l’utilisation du critère âge en matière d’octroi de crédit.