Virginie Bensoussan-Brulé a été interviewée par Europe 1 sur la cyberhaine, le Premier ministre, Edouard Philippe ayant dévoilé un plan contre le racisme et les propos haineux sur Internet.
Comment se fait-il, s’insurge le ministre, qu’il soit plus simple de supprimer la vidéo piratée d’une compétition sportive que des propos haineux sur des réseaux sociaux ? Ils ne sont pas au dessus des lois tout de même !
Plus de moyens contre la cyberhaine
Les services dédiés existent, en l’occurrence, Pharos la plateforme de signalement en ligne, mais il faut les renforcer en personnel et en moyens d’action.
Début 2016, cette cellule était composée de 25 agents, chargés de traiter près de 200.000 signalements, couvrant aussi bien l’incitation à la haine raciale que la pédopornographie, l’escroquerie ou l’apologie du terrorisme.
Il y a également la solution d’avoir des sanctions plus dissuasives, à l’exemple de l’Allemagne qui inflige de lourdes amendes aux sociétés qui n’auraient pas supprimé suffisamment rapidement un contenu illicite après un signalement. Le montant de l’amende maximale a été fixé à 50 millions d’euros, et le délai de suppression à 24 heures.
« Une amende à l’allemande, ça oblige effectivement à changer les textes« , précise de son côté Virginie Bensoussan-Brulé. Actuellement, les hébergeurs deviennent responsables d’un contenu dès lors qu’il leur a été signalé et n’a pas été « promptement » supprimé. Ils endossent alors la responsabilité en lieu et place de l’auteur du contenu. « En l’espèce, on passerait du délit d’incitation à la haine raciale, à une peine pour ne pas avoir supprimé un contenu, qui n’existe pas dans la loi« , explique l’avocate. Qui plaide, elle, pour un montant suffisamment « dissuasif ».
Un statut spécifique pour les réseaux sociaux ?
« Aujourd’hui, les sociétés comme Facebook ou Twitter ont la double casquette hébergeur-éditeur« , confirme Virginie Bensoussan-Brulé. « Elles sont hébergeurs, mais dès lors qu’elles ont eu connaissance de contenus manifestement illicites et qu’elles ne l’ont pas supprimé suffisamment rapidement, leur responsabilité devient celle d’un éditeur. Le cadre juridique actuel permet donc déjà d’obtenir dans les plus brefs délais la suppression de contenus illicites, et à ma connaissance, les sociétés coopèrent. Mais il reste des failles, notamment en raison du nombre de contenus« , juge l’avocate, qui insiste plus sur le renforcement des moyens, notamment le développement de filtres plus efficaces. « L’objectif, c’est que les contenus illicites ne soient jamais publiés« , argue-t-elle.
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« Contre la « cyberhaine », le gouvernement a-t-il les moyens de ses ambitions ? » Interview par Rémi Duchemin, pour Europe 1, le 19 mars 2018.