La règle du non-cumul des qualifications en matière de presse s’applique aux propos publiés sur un réseau social.
Un ancien professeur de droit a diffusé, sur son compte Facebook, des propos qui imputaient au président d’une université, un comportement malhonnête et irrespectueux du droit.
Afin d’obtenir une mesure d’interdiction de publication, ce dernier l’a assigné, en référé, sur le fondement de l’article 29, alinéas 1 et 2, de la loi du 29 juillet 1881.
Le demandeur n’ayant pas clairement établi une distinction entre les propos qu’il considérait diffamatoires et ceux qu’il considérait injurieux, la Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel qui avait jugé que l’assignation n’était pas nulle au regard des dispositions de l’article 53 de la loi du 29 juillet 1881.
Règle du non-cumul des qualifications en matière de presse
L’article 53 de la loi du 29 juillet 1881 impose que l’acte introductif d’instance d’une action fondée sur une infraction au droit de la presse, qu’il s’agisse d’une citation directe ou d’une assignation, contienne l’indication du fait incriminé et le texte de loi applicable à la poursuite.
Sur ce fondement, la jurisprudence considère que l’acte introductif d’instance ne peut viser, pour un fait unique, une qualification cumulative ou alternative, « les exigences de l’article 53 répond[a]nt à la nécessité pour le défendeur de connaître sans équivoque, dès la lecture de l’assignation, l’objet de l’incrimination et la nature des moyens de défense qu’il peut y opposer dans des conditions strictement définies par la loi » (1).
Le respect de la règle du non cumul des qualifications en matière de presse
En l’espèce, l’assignation contenait une liste des propos que le demandeur considérait être injurieux et ne ciblait pas précisément les écrits dont il tentait de faire valoir le caractère diffamatoire.
Ainsi, l’ancien professeur a soulevé la nullité de l’assignation, faute d’identifier clairement les propos dont le caractère diffamatoire allégué par le directeur de l’université.
La 4ème chambre civile de la Cour d’appel de Poitiers a rejeté cette demande de nullité de l’assignation. Elle a considéré que le défendeur :
« connaissait les éléments qui lui étaient imputés à titre de diffamation et ceux qui l’étaient à titre d’injure, qu’il a pu organiser sa défense en fonction des fondements juridiques invoqués et que les faits qualifiés d’injure n’ont pas été compris dans les propos considérés comme diffamatoires » (2).
La Cour d’appel a ainsi considéré qu’il appartenait au défendeur de déduire, en raison de la présence d’une liste de propos imputés à titre d’injure :
- les propos reprochés au titre de la diffamation et
- ceux relevant de l’injure.
Enfin, la Cour de cassation n’a pas suivi ce raisonnement et a annulé l’assignation. Elle a en effet considéré que son contenu allait à l’encontre de :
- la règle du non cumul des qualifications et
- la nature incertaine préjudiciable à la défense de l’ancien professeur d’université.
Chloé Legris
Raphaël Liotier
Lexing E-réputation
(1) Cass. 1e civ. 7-2-2018, n° 17-11316.
(2) Cass. 1e civ. 3-2-2011, n° 09-71711 ; Cass. 1e civ. 26-1-2012, n° 10-27107, inédit.