A l’occasion du webinar organisé par BeMSP pour le rendez-vous annuel French Summit, Eric Le Quellenec a précisé les enjeux du contrat de Managed Service Provider (MSP) (1).
Beaucoup d’Entreprises de Services du Numérique (ESN) doivent revoir leur modèle économique ; à la fois en raison des opportunités ouvertes par le Cloud computing mais aussi à cause de la Covid-19. Elle a eu pour effet d’accélérer la recours au télétravail et aux prestations de services informatique à distance.
Le cadre technique du contrat MSP
Défini comme une entreprise de services informatiques qui gère les systèmes informatiques de ses clients à distance, le modèle du contrat MSP se développe de manière croissante en France.
L’infogérance a pour finalité principale le maintien en condition opérationnel d’un système. A l’inverse, le MSP vise à aligner les services informatiques avec les buts et les enjeux de l’entreprise.
Le prestataire MSP met en effet en place des outils pour détecter les mises à jour à effectuer sur le parc client et assurer un service global et anticipatif. Le MSP permet au prestataire d’industrialiser ses services ou ses process (2).
Véritable partenaire de confiance du client, le prestataire MSP est proactif dans le management des parcs informatiques pour assurer un fonctionnement optimal. Il détecte ainsi les incidents et procède à leur résolution avant que ces derniers impactent le client.
Afin de limiter les coûts et améliorer son efficacité, le prestataire MSP utilise des solutions de type RMM (Remote Monitoring and Management) et PSA (Professional Service Automation). Un RMM permet en effet au MSP de gérer et dépanner à distance les postes et serveurs et ainsi gérer simultanément l’informatique de plusieurs clients. Le PSA quant à lui permet de consolider l’ensemble des fonctions métier dans un outil unique et d’assurer une fondation solide à la croissance de l’entreprise.
Le cadre économique du contrat MSP
Le MSP doit toutefois veiller à conserver une certaine spécialité et ne pas proposer l’intégralité des services susvisés (3).
Pour être efficace, le MSP doit a minima proposer les services suivants dans son catalogue :
- monitoring de l’infrastructure et des postes clients ;
- sauvegarde des données à distance et plans de reprise d’activité ;
- support utilisateur ;
- prise en charge des applications cloud ;
- gestion de parcs.
L’organisation de visites préventives chez le client constitue un élément à part entière de la proactivité. Il en va de même du suivi du cycle de vie du matériel installé.
Le prestataire MSP doit ainsi proposer un périmètre de service défini. Il doit donc être attentif au périmètre inscrit au contrat.
En effet, la facturation du modèle MSP se fait de façon forfaitaire avec le plus souvent des échéances au mois ou au trimestre. Grâce à ce système d’abonnement, le fournisseur s’assure une fiabilité de trésorerie en ayant des revenus mensuels récurrents contrairement à la distribution et aux projets unitaires. Cela lui permet également de fidéliser la clientèle.
Le catalogue MSP vient donc enrichir l’offre des ESN.
La proportion de revenus récurrents dans le chiffre d’affaires est un ainsi un excellent indicateur du positionnement d’un MSP. On considère habituellement que le revenu récurrent doit représenter au moins 50% du chiffre d’affaires.
Le cadre légal du contrat MSP et responsabilité
Le MSP souffre de l’absence de loi encadrant le contrat. Le MSP prendra la forme d’un contrat de prestation informatique ou un contrat d’infogérance classique.
Il convient de procéder à la limitation de responsabilité du prestataire MSP car celui-ci a vocation à tout gérer pour le compte de son client. Eu égard à l’autonomie et à la proactivité du prestataire MSP, il est fortement recommandé au prestataire MSP de présenter des rapports d’activité réguliers et de se rendre chez le client.
Faute de clause de gouvernance et de reporting adapté, le client risque en effet de contester la facturation.
Toutefois, il peut arriver, comme cela est déjà le cas fréquemment actuellement, que le prestataire MSP gère de manière quasi-autonome les systèmes et/ou données qui lui sont confiées. Au sens du RGPD, la qualification de responsable du traitement lui sera cependant difficilement attribuable, la relation de sous-traitance doit ainsi être encadrée en application de l’article 28 du RGPD (4).
En application de cet article, certaines obligations doivent se retrouver dans le contrat de sous-traitance, à savoir principalement :
- l’objet et la durée du traitement de données à caractère personnel ;
- la nature et la finalité de ce traitement ;
- les obligations de sécurité, d’avertissement et alerte envers le responsable du traitement.
La rédaction du contrat MSP doit être rigoureuse dans la définition des services fournis. En effet, un contrat mal rédigé pourrait engager la responsabilité du prestataire MSP sur la qualité de sauvegarde des données et sur l’exposition à des cyber-risques alors même que le MSP n’est en charge que du logiciel qui active la maintenance et non pas de la mise en sécurisation de l’ensemble du système informatique.
Le périmètre d’intervention et le degré d’autonomie du MSP dans les fonctions qui lui sont confiées détermineront l’intensité des obligations à sa charge, ayant pour corollaire l’intensité du devoir de conseil et de mise en garde auprès de son propre client (5).
Ainsi, un contrat MSP équilibré permet de satisfaire les attentes fonctionnelles du client tout en assurant un niveau élevé de sécurité juridique au profit de chacune des parties.
Eric Le Quellenec
Marine Lecomte
Lexing Informatique Conseil
(1) Replay Webinar « contrats MSP : fini les zones d’ombres », Eric Le Quellenec pour BeMSP French Summit, juillet 2020
(2) Entretien Thomas Bresse BeMSP, L’essentiel de la Distribution IT, hors-série n°20, éd. 2020, p. 22.
(3) Entretien Thomas Bresse précité, p. 23.
(4) Contrat cloud : les impacts du RGPD sur la sous-traitance, Eric Le Quellenec, Post du 30-01-2017.
(5) CA Lyon, 1-02-2018, n°16/05963 ; CA Paris, 18-10-2017, n°04/18739.