Le Tribunal de commerce de Paris rappelle l’importance de l’expression des besoins du client dans le cadre des projets en méthode Agile.
Dans un jugement du 7 octobre 2020, le Tribunal estime en effet que, faute d’avoir exprimé ses besoins et effectué des tests, le client ne peut reprocher au prestataire d’avoir manqué à ses obligations contractuelles.
La méthode « Agile », en rupture avec les méthodes classiques très planifiées, a été élaborée pour améliorer la gestion des projets informatiques. Cette méthode repose sur une collaboration accrue et permanente entre les parties prenantes et une flexibilité en cours de réalisation du projet. Il s’agit de s’adapter aux changements et de développer le produit « au fur et à mesure » de l’évolution des besoins et des objectifs du client.
Dans l’affaire ayant donné lieu au jugement du 7 octobre 2020, une société confie à un prestataire informatique le développement de deux applications iOs et d’un site internet. Les parties conviennent de travailler selon les principes de la méthode « Agile ». Le contrat est signé sans qu’aucun cahier des charges ne soit établi.
Se plaignant de nombreux dysfonctionnements sur les applications mobiles et de retards de livraison, le client décide finalement de confier le projet à une société tierce. Il assigne le prestataire initial en remboursement des sommes versées et paiement de dommages et intérêts.
Les spécificités de la méthode agile de développement informatique
Le Tribunal considère que les erreurs relevées, les réponses parfois tardives et la difficulté des parties à s’accorder sur les prestations ne dérogent pas à la norme de ce type de projet, en l’absence de cahier des charges, et ne présentent pas de caractère anormal.
Il souligne que « les obligations qui pèsent sur le fournisseur d’un système d’information, y compris un site web, dépendent des besoins et objectifs spécifiques du client, à condition qu’il les exprime précisément ce qui n’est pas le cas en l’espèce ».
Par ailleurs, le client ne peut arguer de la non-conformité des applications à ses besoins, ni reprocher au prestataire l’absence de tests dans la mesure où :
- le client a accepté, sans émettre de réserve, lesdites applications en signant des procès-verbaux de recette ;
- le contrat ne prévoit pas la réalisation de tests prouvant la conformité des applications ; il revenait donc au client de les effectuer lui-même.
Par conséquent, le Tribunal considère que le prestataire informatique n’a commis aucune faute. Il déboute le client de l’intégralité de ses demandes.
Ce jugement démontre l’importance pour le client, dans le cadre d’un projet mené selon la méthode « Agile » :
- de définir attentivement ses besoins en amont, dans un cahier des charges ou un document annexé au contrat ;
- d’encadrer contractuellement les opérations de recettes et la réalisation de tests sur les livrables.
Une spécification précise des besoins du client dans les documents contractuels permet d’identifier plus facilement le rôle et la responsabilité de chacune des parties ; ce qui est utile, notamment en cas de survenance d’un litige.
Alexandra Massaux
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