Quelles sont les priorités du responsable RH face au nouveau variant ? Décryptons le nouveau protocole sanitaire publié par le ministère du Travail avec Emmanuel Walle (*), directeur du département Droit du travail numérique, Lexing Alain Bensoussan Avocats.
Le protocole sanitaire a été mis à jour le 29 novembre pour prendre en compte la reprise épidémique (1). Qu’en est-il des dispositifs mis en place par les entreprises pour limiter la propagation du nouveau variant ?
Pouvez-vous nous dire ce que change l’arrivée du variant Omicron pour les obligations des employeurs à l’égard de leurs salariés ?
Durant l’épidémie, les employeurs ont dû prendre des mesures adaptées pour limiter les déplacements et réunions des salariés ; il en été de même pour respecter des mesures d’hygiène. La dangerosité du nouveau variant ne remet pas en cause cette demande, bien au contraire. L’employeur est en effet responsable de la santé et de la sécurité des salariés de son entreprise. A ce titre, il doit mettre en œuvre des actions de prévention des risques professionnels, des actions d’information et de formation, et enfin mettre en place une organisation et des moyens adaptés.
La nouvelle version du protocole réactualise des mesures déjà appliquées et renforce des mesures lors des repas collectifs. Les évolutions concernent également sur le strict respect des gestes barrières, le port du masque et l’aération de locaux.
S’agissant du travail sur site dans le contexte actuel, le renforcement des mesures sanitaires au sein des entreprises s’impose. C’est d’autant plus essentiel au regard de la vitesse de propagation du nouveau variant Omicron. Ces mesures consisteront à renforcer l’information de l’ensemble des salariés (rappel du respect systématique des règles d’hygiène et de distanciation, du port du masque, de de la jauge à 4 m2 par personne, etc.), étaler les horaires, encadrer les flux de circulation ou mettre en place du télétravail.
L’objectif est de mettre en place des « piqûres de rappel des règles » afin que personne ne puisse les ignorer.
Quelles sont les principales modifications du protocole sanitaire au travail ?
La principale mise à jour concerne la restauration collective, où le port du masque étant par nature impossible. Le ministère est revenu à une règle qui n’était plus en vigueur depuis plusieurs mois : il faut à nouveau respecter une distance de deux mètres entre chaque personne à table et proscrire le face à face. L’annexe spécifique consacrée à la restauration collective précise qu’il faut « garantir une distanciation de deux mètres entre les chaises occupées par chaque personne, sauf si une paroi fixe ou amovible assure une séparation physique » (2). Il convient donc de mettre à jour le document unique d’évaluation des risques (DUER) de l’entreprise afin d’intégrer ces mesures.
Rappelons pour l’occasion que les établissements qui ont laissé de côté la mise à jour du DUER ou ne l’ont pas mis en œuvre doivent l’inscrire comme une priorité. A noter qu’il existe aujourd’hui des solutions numériques qui peuvent guider « pas à pas » le service RH pour réaliser en un temps record un DUER.
S’agissant du télétravail, il faut rappeler qu’il était de nouveau devenu la norme en septembre et octobre 2020 et avait été assoupli depuis juin 2021. Le nouveau protocole permet aux employeurs qui le souhaitent de faire revenir leurs employés sur site à temps complet.
Ce protocole ne fixe plus de règles d’organisation relatives au télétravail et précise que les employeurs fixent ces règles dans le cadre du dialogue social de proximité. Là encore, l’on constate qu’il peut être utile d’anticiper ces modalités. L’objectif est d’être en mesure de les déployer efficacement s’agissant par exemple, du contrôle des salariés à distance.
Les entreprises peuvent-elles collecter les données d’exposition au nouveau variant ?
Sur cette question, rappelons tout d’abord que quelles que soient les mesures prises par les employeurs, elles ne doivent pas porter atteinte au respect de la vie privée des personnes concernées, notamment par la collecte de données de santé qui iraient au-delà de la gestion des suspicions d’exposition au virus et à ses variants.
A titre d’exemple, ils peuvent être amenés à consigner des éléments liés à la nature d’une exposition au variant Omicron ; lesquelles pourront être communiqués aux autorités sanitaires à leur demande. Il peut s’agir par exemple, de la date et de l’identité du salarié qui a indiqué être contaminé.
En revanche, ils ont toujours l’interdiction de collecter de manière systématique et généralisée, ou au travers d’enquêtes et demandes individuelles, des informations relatives à la recherche d’éventuels symptômes présentés par un employé et ses proches.
Ces mêmes interdictions continuent de peser à l’égard des clients et fournisseurs des entreprises.
Pour rappel, les tests sérologiques et questionnaires sur l’état de santé qui conduisent à la collecte de données médicales relèvent de la seule compétence des personnels de santé et sont à ce titre, soumis au secret médical
Et qu’en est-il des collectivités territoriales à l’égard de leurs administrés ?
Ces dernières peuvent en effet être amenées à récupérer les données des personnes disposant d’un schéma vaccinal complet au niveau national. Ces données leur permettront de mener des actions complémentaires d’accompagnement au niveau local :
- suivi des personnes vulnérables non encore vaccinées ;
- approvisionnement des lieux de vaccinations en vaccins ;
Quoiqu’il en soit, les mêmes interdictions évoquées ci-dessus pour les employeurs valent pour les collectivités territoriales à l’égard de leurs personnels et administrés. En termes de sécurité au travail, les règles sont les mêmes dans les entreprises et dans la fonction publique.
Propos recueillis par Isabelle Pottier
Lexing Département Etudes et publications.
(*) Emmanuel Walle est également formateur inter-entreprise depuis de nombreuses années auprès de Comundi et Wolters Kluwer sur les problématiques de droit du travail en matière de numérique.
(1) Disponible sur https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/protocole-nationale-sante-securite-en-entreprise.pdf
(2) Disponible sur : https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/doc_cnam_fiches_covid_restaurants-v29-11.pdf