NFT Metabirkin condamné : Hermès remporte son procès en contrefaçon

NFT Metabirkin condamnéLe créateur des NFT Metabirkin condamné à verser 133 000 dollars de dommages et intérêts à la marque de luxe Hermès. Le tribunal fédéral de New York donne une première appréciation de l’application de la contrefaçon de marque dans le métavers.

NFT Metabirkin

L’affaire débute en 2021, avec la présentation à Art Basel Miami d’une œuvre numérique intitulée MetaBirkin par Mason Rothschild. Celle-ci reproduit, sous forme de NFT, le sac iconique de la maison Hermès paré de fausse fourrure. Face à ce succès, l’artiste émet  une série de cent NFTs Metabirkin, dont il obtient l’équivalent de centaines de milliers d’euros en cryptomonnaie (1).

Le 14 janvier 2022, les sociétés Hermès assigne Mason Rothschild en contrefaçon devant le Tribunal fédéral de New York.

Lors d’une première phase procédurale, l’artiste soulève l’irrecevabilité de la demande, invoquant la liberté d’expression consacrée par le premier amendement de la Constitution américaine. Selon lui, les NFTs litigieux seraient des œuvres d’art dénonçant la maltraitance animale. En cas de rejet du moyen(2), l’artiste obtient de la Cour la reconnaissance de l’applicabilité du « Rogers test » (3). Tiré de l’affaire Rogers v. Grimaldi (4), ce test permet de mettre en balance les droits de marque et la liberté de création artistique.

Il permet d’écarter l’atteinte à la marque lorsque la reproduction s’applique au titre d’une œuvre et n’induit pas en erreur quant à la source ou au contenu de l’œuvre. Se faisant, la Cour admet qu’un NFT puisse être qualifié d’œuvre d’art.

Las, dans son verdict du 8 février 2023, le jury appelé à se prononcer sur le fond écarte cette hypothèse (5).

Le NFT Metabirkin est une contrefaçon

Entérinant la décision du jury, le jugement condamne l’artiste pour contrefaçon et dilution de marque et cybersquatting. Il accorde aux sociétés Hermès 110 000 dollars sur le premier chef de réparation et 23 000 dollars sur le second (6).

Le tribunal déclare que la protection par la marque BIRKIN est ici étendue aux NFTs.  Pourtant, cette marque n’est pour le moment pas protégée pour les produits et services numériques.

A cet égard, le tribunal répond à une question fondamentale concernant l’applicabilité du droit des marques aux NFTs. Une marque désignant des produits physiques peut-elle voir sa protection étendue à leur représentation numérique ? En répondant positivement, la cour comble l’absence de cadre juridique propre au métavers (7). 
Elle répond également à certaines des problématiques soulevées par le caractère virtuel de celui-ci.
Cette décision permet alors d’envisager l’instauration d’un nouveau principe de protection en droit des marques. Ainsi, des produits virtuels pourraient être protégés par le biais des produits physiques correspondants pour lesquels une marque est déposée.

Produits physiques ou virtuels : même protection ?

Cette interprétation se rapproche de la solution rendue le 8 février 2023 par l’Office de l’Union Européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO).

Cette décision concernait le refus d’enregistrement, à titre de marque, du motif tartan Burberry pour couvrir les NFTs (8).

L’office rappelle qu’une marque constituée d’un motif décoratif simple et banal ne remplit pas la fonction d’indication d’origine exigée. Il retient ensuite que ledit motif ne diffère pas essentiellement des motifs à carreaux communément trouvés dans le commerce. 

Le fait que le motif soit applicable à des NFTs est indifférent. L’EUIPO déclare qu’un aspect essentiel des produits virtuels en cause « est d’imiter les concepts fondamentaux des produits du monde réel ».

Ainsi et pour l’heure, considère-t-on qu’une marque protégée pour des produits physiques l’est également pour leur avatar virtuel ?

Corollairement, un signe non protégeable dans le monde réel, ne l’est pas davantage dans le métavers.

Virginie Brunot
Cécile Merveilleux du Vignaux
Lexing Droit Propriété Industrielle

Notes

(1) Voir nos posts « Metabirkin : quel droit des marques dans le métavers ? » (04-07-2022) et « NFT Metabirkin : ouverture imminente du procès en contrefaçon » (27 01 2023).
(2) US District Court of Southern district of New York, Hermes Int. and Hermes of Paris Inc. vs. Mason Rothchild, Order, 05 05 2022.
(3) US District Court of Southern District of New York, Hermes Int. and Hermes of Paris Inc. vs. Mason Rothchild, Opinion and Order, 30 09 2022.
(4) Rogers c. Grimaldi, 875 F.2d 994 (2d Cir. 1989, 05 05 1989.
(5) US District Court of Southern district of New York, Hermes Int. and Hermes of Paris Inc. vs. Mason Rothchild, Verdict, 14-2-2023.
(6) US District Court of Southern district of New York, Hermes Int. and Hermes of Paris Inc. vs. Mason Rothchild, Final Judgment, 14 02 2023.
(7) Alain Bensoussan, « Droits et devoirs- Vers un droit des métavers ? », Planète robots n°72, Mars/Avril 2022.
(8) Décision EUIPO rejet demande d’enregistrement motif Burberry tartan en tant que marque pour des NFTs, 08 02 2023.

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