La chambre criminelle de la Cour de cassation reconnait que le libre accès des données à caractère personnel ne retire rien au caractère déloyal de la collecte (1).
Dans cette affaire, à la suite de la demande d’une société, un enquêteur privé a effectué des recherches sur des personnes. Celles-ci portaient sur des données à caractère personnel. Par un arrêt du 27 janvier 2023, la cour d’appel de Versailles condamne l’enquêteur privé à un an d’emprisonnement avec sursis et 20 000 euros d’amende. Ce dernier forme alors un pourvoi en cassation.
La question posée à la Cour de cassation était donc de savoir si la collecte de données à caractère personnel peut être considérée comme déloyale dès lors que ces données sont en libre accès.
Dans son arrêt n° 23-80.962 du 30 avril 2024, la chambre criminelle de la Cour de cassation confirme la position des juges du fond s’agissant du caractère déloyal de la collecte de données personnelles.
Le libre accès des données ne retire pas le caractère déloyal de la collecte
Le libre accès des données retire-t-il le caractère déloyal de la collecte ?
La singularité de cette affaire réside dans le fait que les données collectées étaient en libre accès. Dans sa décision, la Cour de cassation affirme que cela n’enlève en rien le caractère personnel des données collectées. Le libre accès ne rend ainsi pas la collecte licite.
En l’espèce, les données concernées étaient « issues de la capture et du recoupement d’informations diffusées sur des sites publics tels que sites web, annuaires, forums de discussion, réseaux sociaux, sites de presse régionale ».
La Cour de cassation retient que « le fait que les données à caractère personnel collectées par le prévenu aient été pour partie en accès libre sur internet ne retire rien au caractère déloyal de cette collecte ».
L’appréciation du caractère déloyal de la collecte
Le libre accès des données retire-t-il le caractère déloyal de la collecte ?
Dans son arrêt, la Cour de cassation relève le caractère déloyal de la collecte « dès lors qu’une telle collecte, de surcroît réalisée à des fins dévoyées de profilage des personnes concernées et d’investigation dans leur vie privée, à l’insu de celles-ci, ne pouvait s’effectuer sans qu’elles en soient informées ».
Ainsi, la Cour de cassation estime déloyale la collecte de données effectuée sans avertissement des personnes concernées. Elle considère également comme déloyale la collecte réalisée dans un but détourné de sa finalité.
Pour conclure, cette décision renforce le droit à l’information des personnes sur l’utilisation de leurs données à caractère personnel, en particulier dans les relations entre employeurs et employés.
Avec la collaboration de Manon Juby, stagiaire, étudiante en Master Droit des espaces et des activités maritimes.
Virginie Bensoussan-Brulé
Avocate, Directrice du pôle Contentieux numérique
Virginie Bensoussan-Brulé
Avocate, Directrice du pôle Contentieux numérique
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