Non-conformité d’une solution pour la détection de gestes suspects

Hands of woman typing on laptop with double exposure of CCTV camera, planet interface and cityscape. Concept of surveillance and security. Toned image

Le 21 juin 2024, le Conseil d’État a rendu une décision importante à l’encontre d’une société spécialisée dans l’intelligence artificielle appliquée à la sécurité ayant développé une solution pour la détection de gestes suspects (1).

La procédure de contrôle diligentée par la Cnil

Non-conformité d’une solution pour la détection de gestes suspects

La société requérante avait développé une solution de détection de gestes suspects, installée sur des boîtiers adossés à un dispositif de vidéoprotection.

La Cnil, à l’issue d’une procédure de contrôle orientée sur la conformité des traitements de données personnelles mis en œuvre au travers de la solution, a conclu à la non-conformité de ce dispositif à la règlementation relative à la protection des données et en a informé les clients utilisateurs de cette décision.

Les fondements de la saisine du Conseil d'État

Non-conformité d’une solution pour la détection de gestes suspects

Contestant la décision de la Cnil, la société requérante a saisi le Conseil d’État en référé, demandant la suspension de la décision en invoquant que :

  • • la position de l’autorité de contrôle aurait un impact significatif sur ses activités commerciales ;
  • • cette décision excéderait ses pouvoirs en constituant une sanction déguisée.

Au soutien de ses prétentions, la société requérante invoquait les dispositions de l’ancien article R253-3 du Code la sécurité intérieure qui, selon elle, écartait tout droit d’opposition des personnes concernées à un traitement de vidéoprotection.

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La position de la Cnil

Non-conformité d’une solution pour la détection de gestes suspects

La requérante faisait valoir que l’application de cet article à sa solution pour la détection de gestes suspects exclurait la position de la Cnil sur l’utilisation des caméras augmentées dans l’espace public (2).

En effet, dans cette position du 19 juillet 2022, la Cnil rappelait que le droit d’opposition doit être garanti à tout moment et effectif et énonçait que « la plupart des dispositifs nécessitent, pour pouvoir être légalement mis en œuvre, l’existence d’un texte de nature législative ou règlementaire les autorisant et les encadrant ».

Pour plus de détails sur la position de la Cnil, vous pouvez consulter notre article à ce sujet.

L’apport de la décision du Conseil d’État

Non-conformité d’une solution pour la détection de gestes suspects

Le Conseil d’État a estimé que les arguments de la société requérante n’étaient pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de la décision de la Cnil.

Par ailleurs, il rappelle que l’article 10 de la loi du 19 mai 2023 (3), énonçant que les traitements d’images de vidéoprotection autorisés par l’article L.252-2 du Code de la sécurité intérieure peuvent, à titre expérimental, faire l’objet d’un traitement algorithmique uniquement pour « assurer la sécurité de manifestations sportives, récréatives ou culturelles, qui par l’ampleur de leur fréquentation ou par leurs circonstances, sont particulièrement exposées à des risques d’actes de terrorisme ou d’atteintes graves à la sécurité des personnes ».

Or, la solution de détection de gestes suspects, développée par la société requérante, ne poursuit pas, pour le Conseil d’Etat, une telle finalité. La requête de suspension du courrier de non-conformité de la Cnil est ainsi logiquement rejetée par le Conseil d’Etat.

Cette décision permet de souligner les défis auxquels sont confrontées les entreprises innovantes dans le domaine de la sécurité lorsqu’il s’agit de respecter les exigences pour les droits et libertés des personnes concernées. Elle met également en lumière l’importance de la protection des données personnelles dans un contexte où les nouvelles technologies de surveillance deviennent, par leur complexité, de plus en plus intrusives.

Nos avocats peuvent vous accompagner, n’hésitez pas à nous contacter : paris@lexing.law.

compétence du juge administratif

(1) Conseil d’État, Décision n°495153 du 21-6-2024.
(2) Cnil, Article du 19-7-2022.
(3) Loi n°2023-380 du 19-5-2023 relative aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, art. 10.

Virginie Bensoussan-Brulé VIB

Virginie Bensoussan-Brulé

Avocate directrice du Pôle Contentieux numérique

Barthélémy Busse

Avocat, Responsable d'activité Contentieux numérique au sein du Pôle Contentieux numérique

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