L’avis consultatif du Conseil National du Numérique (CNN) sur la cybercriminalité a été rendu.
Le Conseil National du Numérique (CNN), créé par décret du 29 avril 2011, a rendu le 17 juin dernier son avis sur le projet de décret du gouvernement pris pour l’application de l’article 18 de la loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN).
Cet article, modifié par la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, prévoit la possibilité pour des autorités administratives de prononcer des mesures administratives à l’encontre des auteurs de contenus, des hébergeurs ou des fournisseurs d’accès à internet (FAI) lorsqu’il est porté atteinte ou qu’il existe un risque sérieux et grave d’atteinte à l’ordre et à la sécurité publics, à la préservation des intérêts de la défense nationale, à la protection des mineurs, de la santé publique ou des consommateurs.
L’avis consultatif du CNN
Les modalités d’application de cet article font l’objet du décret qui a été soumis au CNN pour avis consultatif.
Le CNN explique tout d’abord que la lutte contre la cybercriminalité constitue un objectif important qui doit être proportionné, harmonisé et respectueux du droit existant et des principes constitutionnels, (notamment la liberté d’expression).
Sur la procédure, le CNN rappelle au gouvernement que ce dernier a l’obligation, en vertu de la directive 98/48/CE, de notifier un tel projet de décret à la Commission européenne pour qu’il soit opposable à l’ensemble des justiciables.
Il recommande de clarifier le terme « éditeur de site », qui n’a fait l’objet d’aucune définition législative ou réglementaire, et de le remplacer par l’ « auteur du contenu », qui doit être le premier responsable et le premier destinataire de toute injonction administrative.
Le CNN rappelle le principe de subsidiarité en matière d’action contre les contenus répréhensibles sur internet : l’administration doit d’abord s’adresser à l’auteur du contenu, à défaut de réponse à l’hébergeur, et en dernier recours aux FAI. En conséquence, le CNN critique l’article 4 du projet de décret, qui permet d’enjoindre directement aux FAI de faire cesser l’accès au contenu, en cas d’urgence, sans s’adresser préalablement au premier responsable.
S’appuyant sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel, le CNN critique également la possibilité, pour une autorité administrative, d’imposer la mise en place de mesure de blocage de contenus aux FAI. Le Conseil recommande que cette mesure ne puisse intervenir qu’au terme d’un débat contradictoire, sous l’appréciation et le contrôle préalable d’un juge, et selon une procédure instituée par voie législative.
Par ailleurs, le CNN constate que le pouvoir d’injonction de l’autorité administrative auprès des hébergeurs ne respecte pas la procédure de notification prévue à l’article 6-I-5 de la LCEN, qui permet de présumer que l’hébergeur a bien acquis la connaissance des faits litigieux.
Enfin le CNN désapprouve la possibilité de pouvoir sanctionner pénalement les hébergeurs qui méconnaîtraient les injonctions de l’autorité administrative et recommande au gouvernement de clarifier la portée de la sanction complémentaire de « confiscation de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou la chose qui en est le produit ».