Internet contentieux
Pénal numérique
Vol d’identité d’une personne physique et phishing
Un salarié qui avait envoyé un message électronique de nature diffamatoire en utilisant l’identité d’un de ses collègues à plusieurs ingénieurs de son entreprise, a été poursuivi sur le fondement de l’article 434-23 du Code pénal réprimant le fait de prendre le nom d’un tiers pour commettre une infraction pénale. Se faisant, il se livrait à une technique de fraude bien connue de l’internet : le phishing. En septembre 2005, la Cour d’appel de Colmar a considéré que les termes du message électronique avaient un caractère diffamatoire envers celui dont l’identité avait été usurpée et auraient pu déterminer des poursuites pénales contre lui, notamment « l’inscription d’une condamnation au casier judiciaire d’un tiers réellement existant ». Elle a donc déclaré l’employé coupable du chef de prise du nom d’un tiers pour déterminer des poursuites pénales contre lui et a prononcé contre lui une peine d’emprisonnement de trois mois avec sursis.
La chambre criminelle de la Cour de cassation ne l’a toutefois pas suivi dans sa démarche. Dans un arrêt du 29 mars 2006, elle a au contraire considéré que la cour d’appel avait insuffisamment caractérisé et qualifié les éléments, tant matériels qu’intentionnel, du délit de diffamation, notamment le contenu du message diffusé sous une fausse identité. Les poursuites pour diffamation exigent en effet que puisse être identifiée de manière précise la victime de la prétendue diffamation ce qui n’était semble-t-il pas le cas en l’espèce. La cour d’appel s’étant abstenue « de rechercher si le message électronique sous la signature d’André Y… [celui dont l’identité avait été usurpée] était susceptible de conduire à l’identification d’une personne précise, autre que sa propre personne, ont entaché leur décision d’un manque de base légale ». La Cour de cassation a dû partiellement annuler l’arrêt et n’a donc pas eut la possibilité de sanctionner la pratique du phishing sur ce fondement. Pour être sanctionnée, l’usurpation d’identité doit en effet entraîner à l’égard de l’usurpé des conséquences pénales.
Cass. crim. 29 mars 2006, n° de pourvoi : 05-85857
Phishing et vol d’identité, Alain Bensoussan, 01 Informatique du 07 juillet 2006
(Mise en ligne Juillet 2006)