Dans un arrêt du 15 septembre 2011, la Cour d’appel de Paris infirme le jugement du Tribunal de grande instance de Paris en énonçant que l’action du MRAP n’est pas recevable.
Le délit d’injure publique
En septembre 2009, le MRAP (Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples) avait fait citer Monsieur Brice Hortefeux devant la 17ème chambre correctionnelle du Tribunal de grande instance de Paris ; pour le délit d’injure publique envers un groupe de personnes à raison de leur origine, délit prévu et réprimé par l’article 33 alinéa 3 de la loi du 29 juillet 1881.
Cette citation faisait suite aux propos, largement diffusés par la suite, tenus par Monsieur Brice Hortefeux, alors ministre de l’Intérieur, lors de l’université d’été de l’UMP de Seignosse. Le Tribunal de grande instance de Paris, par un jugement du 4 juin 2010, avait reçu le MRAP en sa constitution de partie civile. Il a par ailleurs, reconnu Monsieur Brice Hortefeux coupable d’injure non publique envers un groupe de personnes à raison de leur origine.
Injure non publique ou injure publique ?
Le Tribunal de grande instance avait refusé de conférer un caractère public à l’injure, l’article 23 de la loi du 29 juillet 1881 disposant que la publicité n’était établie que s’ils étaient « proférés dans les lieux ou réunions publics » ; si la preuve était rapportée de l’intention de leur auteur qu’ils soient entendus au-delà d’un cercle de personnes unies entre elles par une communauté d’intérêts, laquelle est exclusive de toute publicité.
La Cour d’appel de Paris a confirmé le défaut de publicité de l’injure en énonçant que « les propos retenus comme injurieux ont été tenus en marge d’une manifestation réservée aux seuls militants de l’UMP mais ouverte à la presse, la présence de cette dernière n’ôtant pas, à elle seule, à la réunion, ni au lieu où elle se tenait, leur caractère privé ».
La Cour d’appel de Paris a infirmé le jugement du Tribunal de grande instance de Paris en énonçant que l’action du MRAP n’était pas recevable. La cour rappelle l’article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881, qui dispose que :
« Toute association régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits, se proposant, par ses statuts (…) de combattre le racisme ou d’assister les victimes de discrimination fondée sur leur origine nationale, ethnique, raciale ou religieuse, peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions prévues par les articles 24 (alinéa 8), 32 (alinéa 2) et 33 (alinéa 3), de la présente loi, ainsi que les délits de provocation prévus par le 1° de l’article 24, lorsque la provocation concerne des crimes ou délits commis avec la circonstance aggravante prévue par l’article 132-76 du code pénal ».
Certes, le MRAP remplit bien les conditions posées pour une association pour exercer les droits de la partie civile dans le cas du délit d’injure publique de l’article 33 alinéa 3 de la loi du 29 juillet 1881. Mais l’article 624-4 de Code pénal, qui prévoit et réprime l’injure non publique, n’entre pas dans le champ d’application de l’article 48-1 de la loi du 29 juillet 1881.
Il n’y est en effet pas visé. En raison du principe d’interprétation stricte de la loi pénale, la Cour d’appel de Paris n’a pu que constater l’absence de capacité à agir du MRAP, et, faute de recevabilité de sa constitution de partie civile, le débouter de toutes ses demandes.
Le MRAP a aussitôt annoncé qu’il envisageait de se pourvoir en cassation et de déposer une question prioritaire de constitutionnalité.