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Economie juridique

Préjudices subis dans le cadre de la rupture de négociations contractuelles

Développement d’une solution de téléphonie mobile embarquée

La société Airbus France a été à l’origine de la création de la société Icarelink qui devait développer et mettre au point une solution permettant l’utilisation de téléphones mobiles GSM dans les avions commerciaux. Dans le cadre d’un accord de confidentialité conclu en 2003, elles fixent les grandes lignes de leur futur contrat de partenariat dont la signature est conditionnée à la réussite du programme d’expérimentation de la solution. Il est prévu qu’Icarelink développe la solution, et uniquement celle-ci, sous le contrôle d’Airbus France, qui pourra l’exploiter à titre exclusif pendant 4 ans à compter de la signature du contrat. En contrepartie, Airbus devra verser à Icarelink une avance de 800.000 €, lui assurer un revenu minimum de un million d’euros par an pendant les quatre années d’exclusivité, et lui verser des redevances proportionnelles aux revenus issus de l’exploitation commerciale de la solution. Bien qu’elle ait annoncé publiquement la réussite du programme, Airbus lance un appel d’offres pour un système de télécommunication mobile embarqué, puis annonce à Icarelink qu’elle n’est pas retenue pour ce programme. Icarelink a saisi le Tribunal de commerce de Toulouse qui a ordonné une expertise pour déterminer les conditions de la rupture des relations entre les deux sociétés et, le cas échéant, chiffrer les préjudices subis.

L’enjeu

    La victime de la rupture abusive dont la survie aurait pu être compromise sans cette décision, obtient une indemnisation d’un montant total de 2 250 000 € au titre de l’exécution provisoire. Mais Airbus France peut demander la suspension de l’exécution provisoire et faire appel de cette décision.

Dans le cadre d’un projet de partenariat non abouti

Le Tribunal juge que les engagements futurs prévus par l’accord de confidentialité sont devenus contractuels dès lors qu’Airbus a annoncé le succès de l’expérimentation, condition de conclusion de l’accord définitif. Il retient le caractère abusif et brutal de la rupture des relations contractuelles (1). La société Icarelink, dont Airbus était le seul client, a subi des pertes d’exploitation suite à la rupture, évaluées à 698 571 € par celle-ci et à 192 169 € par le rapport d’expertise. La décision considère que cette dernière estimation apparaît bien fondée et fixe le montant de l’indemnisation à ce titre à 150 000 € en tenant compte d’une période d’évaluation plus courte. Icarelink demandait aussi à être indemnisée des 4 000 000 € qu’elle devait percevoir pour les 4 premières années d’exploitation. Sur ce point, le rapport d’expertise n’a retenu que la perte de marge brute, dès lors qu’Icarelink n’a pas eu à supporter les coûts d’exploitation, et pour une période de 2 ans seulement, car la solution n’avait pas été certifiée, soit 1 167 874 €. Après avoir annoncé une indemnisation minimale de 4 000 000 €, la décision ramène ce montant à 2 000 000 € en considérant que la technologie aurait pu devenir rapidement obsolète en s’appuyant sur l’évaluation du rapport d’expertise, fondée sur les résultats. Au titre des redevances sur l’exploitation commerciale de la solution et compte tenu du potentiel de ce marché, Icarelink invoquait une perte de chance de gain de 50 millions €. Le Tribunal ne s’estime pas suffisamment informé sur ce point et ordonne une nouvelle expertise pour chiffrer cette perte de chance de gains. Il accorde encore 100 000 € à Icarelink pour ses frais irrépétibles, incluant les coûts de la première expertise.

Les conseils

    Sous réserve d’appel, cette première indemnisation, pourrait être considérablement augmentée à l’issue de la seconde expertise, ordonnée afin de chiffrer les gains non réalisés sur un marché en pleine expansion.

TC Toulouse 25 septembre 2008


Paru dans la JTIT n°81/2008 p.11

(Mise en ligne Octobre 2008)

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