Interview du mois
Mme Isabel Toutaud, Responsable juridique de l’Afnic |
Pouvez-vous nous présenter brièvement cette nouvelle procédure dénommée PREDEC ?
Depuis la publication du décret du 6 février 2007 venu renforcer la protection de certains signes, nous avons été sollicités par bon nombre d’acteurs qui désiraient faire valoir leurs droits au regard des dispositions de ce décret. Il est vrai que le décret précise le rôle et les pouvoirs de l’office d’enregistrement du .fr en matière de résolution des litiges. Ainsi, très logiquement, les ayants droits se sont adressés à l’Afnic qui est en charge de la zone de nommage français. Pour y répondre, nous avons décidé de mettre en place, en juillet 2008, une procédure extra-judiciaire de résolution des litiges qui ne remplace pas les solutions déjà existantes, à savoir l’arbitrage proposé par l’OMPI (Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelles), ou les médiations ou recommandations du CMAP (Centre de Médiation et d’Arbitrage de Paris) ou du FDI (Forum des Droits de l’Internet).
Quelles sont les conditions permettant de mettre en œuvre cette procédure ?
Pour pouvoir déposer une demande auprès de l’Afnic, l’ayant droit doit être éligible au titre des dispositions des articles R 20-44-43 à 46 (par exemple, les institutions nationales, les collectivités territoriales, mais aussi les titulaires de droit de propriété intellectuelle, etc…). Nous ne rendons de décision que dans des cas d’atteinte manifeste aux dispositions du décret. Ces cas sont précisés sur le site web de l’Afnic (1). Cette procédure permet d’obtenir une décision de transmission ou de suppression du nom de domaine dans un délai de 45 jours minimum. Pendant toute la durée de la procédure, le nom de domaine est gelé. Avant l’exécution de la décision, nous permettons à chacune des parties de saisir les juridictions nationales ou d’ouvrir une Procédure Alternative de Résolution des Litiges (PARL), conformément aux dispositions de la charte et, en cas de désaccord sur la décision, les parties peuvent recourir à une PARL.
En pratique, comment peut-on ouvrir une procédure PREDEC ?
C’est très simple, il suffit de créer un compte sur la plateforme dédiée à PREDEC et de saisir sa demande en ligne. Mais j’insiste sur un point, le demandeur doit motiver sa demande en déposant un dossier complet accompagné de toutes les pièces utiles à sa requête. En effet, nous avons fait le choix de ne pas procéder à des recherches complémentaires et rendons nos décisions selon les pièces transmises. Le demandeur doit faire l’effort de prouver l’absence de droit et d’intérêt légitime du titulaire du nom de domaine à faire valoir sur ce nom et son éventuelle mauvaise foi. Le titulaire du nom de domaine litigieux est informé de l’ouverture de la procédure par email, mais également par courrier postal ; il dispose d’un délai de 15 jours pour répondre aux arguments du demandeur et utilise, pour ce faire, la plateforme en ligne. Depuis son ouverture, nous avons déjà traité plus d’une quarantaine de dossiers. Les décisions sont publiées sur le site web de la plateforme. Je vous invite à les consulter. Les premiers échos sont très positifs. En effet, cette procédure est rapide, facile d’accès et peu onéreuse (les frais de procédure s’élèvent à 250 euros HT par nom de domaine). Par ailleurs, elle s’inscrit parfaitement dans le prolongement de la politique de gestion des litiges pour les domaines internet français, mise en place par l’Afnic depuis plusieurs années.
(1) Association Française pour le Nommage Internet en Coopération.
Interview réalisée par Isabelle Pottier, avocat.
Parue dans la JTIT n°85/2009