La traduction en français d’un document écrit en langue étrangère est nécessaire pour éviter que celui-ci ne soit écarté par les juges lors d’un contentieux. La Cour de cassation a rappelé les règles générales de droit des contrats et de procédure, concernant l’emploi de la langue française et la notion de transaction, à l’occasion d’un litige entre l’Agence pour la sécurité de la navigation aérienne en Afrique et à Madagascar (ASECNA) et une compagnie aérienne soudanaise.
La première a assigné la seconde en paiement de diverses factures. En 2007, le tribunal a fait droit à sa demande avec exécution provisoire (paiement de 3 580 867,95 euros majorée des intérêts de retard au taux de 6%). L’affaire ayant été radiée du rôle en 2008 (faute pour les parties d’avoir accompli les diligences procédurales qui leur incombaient), le conseiller de la mise en état a constaté la péremption de l’instance.
La Cour d’appel de Paris a confirmé en décembre 2010, la péremption de l’instance, refusant de considérer que l’instance s’était précédemment éteinte par l’effet d’une transaction intervenue entre les parties. La société aérienne s’est pourvue en cassation reprochant à la cour d’appel d’avoir soumis des pièces de caractère non procédural à une exigence obligatoire de langue française et partant, de les avoir écartées, violant par là même l’ordonnance de Villers-Cotterêts d’août 1539 ainsi que l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
La Cour de cassation rejette le pourvoi de la compagnie aérienne, le 27 novembre 2012 (1). Elle considère que « si l’ordonnance de Villers-Cotterêts d’août 1539 ne vise que les actes de procédure, le juge, sans violer l’article 6 de la CESDH est fondé, dans l’exercice de son pouvoir souverain, à écarter comme élément de preuve un document écrit en langue étrangère, faute de production d’une traduction en langue française ».
Par ailleurs, la société aérienne reprochait à la cour d’appel d’avoir déclaré irrecevable une lettre matérialisant l’accord des parties et constituant une transaction. La Cour de cassation rejette également cet argument. Elle considère qu’une lettre qui constitue une mise en demeure de payer « ne contient nullement les termes d’une transaction », car celle-ci « suppose l’existence de concessions réciproques des parties ».
Même si elle entraîne un coût certain pour la partie qui le produit en justice, si l’une des parties souhaite produire en justice un document écrit en langue étrangère, il conviendra alors de s’assurer que cet acte soit accompagné d’une version traduite en français. A défaut, celui-ci pourra être écarté par le juge.
Par ailleurs, il est rappelé que pour être qualifiée de transaction, l’acte de renonciation doit être subordonné à l’existence de concessions réciproques des parties.
Marie-Adelaide de Montlivault-Jacquot
Alexandra Massaux
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(1) Cass. com. n°11-17185 du 27-11-2012.