La signature électronique est remise au goût du jour par la Cour d’appel de Nancy – Il s’agit d’une décision importante pour tous les prestataires, fournisseurs et leurs clients, qui souhaitent passer au tout numérique. Elle a en effet vocation à s’appliquer dans les relations B to B mais aussi B to C. Il s’agit à l’origine d’une « simple » affaire portée en 2011 devant le Tribunal d’Instance d’Epinal par une banque à l’encontre d’un particulier pour dépassement d’une autorisation de découvert et non-paiement.
En l’espèce, entre 2003 et 2008, la banque accorde à son client, un particulier personne physique, successivement, plusieurs crédits sous forme de découvert en compte. En 2008, la dernière autorisation de crédit est « traitée » par voie électronique, l’acceptation du client étant formalisée par l’utilisation d’une solution de signature électronique.
Après plusieurs mensualités restant impayées, la banque attrait son client en justice. Mais celui-ci ne comparait pas et n’est pas représenté.
Le premier juge se penche sur la réalité de l’acceptation de l’offre par le client et par la même, de la réalité de sa signature… électronique. Donnant raison au client, il considère tout simplement qu’il n’avait pas signé le découvert autorisé au motif qu’un simple document imprimé, intitulé « fichier de preuve de la transaction », produit aux débats sans garantie d’authenticité, ni de justification de la sécurisation de la signature employée, était insuffisant pour faire le lien entre l’offre de prêt et ce document
Cette décision n’a pas été sans conséquence et nombre de directions juridiques se sont alertées sur les risques de mettre en oeuvre dans l’entreprise une solution basée sur une signature électronique.
La Cour d’appel de Nancy rappelle la fonction et les conditions de validité et de fiabilité de la signature électronique (1) :
« La signature électronique nécessaire à la perfection d’un acte juridique identifie celui qui l’appose. Elle manifeste le consentement des parties aux obligations qui découlent de cet acte.
Lorsqu’elle est électronique, elle consiste dans l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie conformément aux dispositions du décret n°2001-272 du 30 mars 2001 ».
La Cour d’appel examine alors spécialement l’ensemble des éléments techniques transmis aux débats ayant permis la signature électronique de l’autorisation de découvert, dont « le fichier de preuve de la transaction ».
Les juges constatent que ce fichier de preuve est bien émis par une autorité de certification (la société Keynectis), que le numéro de l’avenant autorisant le découvert est bien mentionné sur ce fichier de preuve. Ils en déduisent par la même que l’avenant concerné est bien signé électroniquement par le client.
La présomption de fiabilité de la signature électronique de l’avenant est en l’espèce rapportée par le fichier de preuve technique, consacrant ainsi la signature électronique présumée fiable d’un document dématérialisé.
Il s’agit de la première décision significative sur la signature électronique qui se base sur l’examen du « fichier de preuve » d’un acte signé électroniquement.
L’établissement et la conservation du « fichier de preuve » de la signature électronique de l’acte par l’autorité de certification est donc essentielle côté prestataire. Ce fichier de preuve doit également être conforté par le prestataire par une convention de preuve avec ses clients, destinée à sécuriser en amont la signature des documents.
Polyanna Bigle
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(1) CA Nancy, RG 12/01383 du 14-2-2013.