Réjouissons-nous de ce que le cadre tant attendu de la vente de médicaments en ligne par les pharmacies d’officine soit maintenant complet ! (1). Six mois, presque jour pour jour, c’est le temps qu’il aura fallu pour bâtir, en partant de rien, ce dispositif juridique ultra détaillé : les dispositions légales (2), réglementaires (3) et déontologiques (4) sont maintenant complétées par celles d’un arrêté qui définit les bonnes pratiques de la dispensation des médicaments par voie électronique et entrera en vigueur le 12 juillet (5).
Et ne gâchons pas la fête en rappelant, qu’à terme, subsiste une incertitude sur l’objet même desdites ventes en ligne : les médicaments dits de médication officinale exclusivement ou, plus généralement, les médicaments non soumis à prescription. Si, à ce jour, comme le recommandait l’Autorité de la Concurrence (6), tous les médicaments non soumis à prescription peuvent être vendus en ligne par une pharmacie d’officine, il n’en sera peut-être plus ainsi demain. L’exécution de l’article L.5125-34 CSP, en ce qu’il circonscrit l’activité de commerce électronique par une pharmacie d’officine aux seuls médicaments de médication officinale, n’a été que suspendue, le temps pour le Conseil d’Etat de statuer au contentieux sur sa légalité.
Le pharmacien peut dispenser et vendre à distance sur internet des médicaments en accès direct (non soumis à prescription) et des produits habituellement vendus par des pharmaciens, à des clients résidents en France. Il doit faire une demande d’autorisation de commerce électronique de médicaments et de création du site internet dédié, au directeur de l’ARS dont dépend son officine. Celle-ci sera réputée acceptée faute de réponse dans un délai de deux mois. Dans les quinze jours suivant l’autorisation de l’ARS, il informe le CNOP de la création du site.
Les textes mettent l’accent sur l’indépendance dont le pharmacien doit faire preuve à l’égard de l’industrie pharmaceutique et sur le nécessaire respect de la réglementation en matière de communication et de publicité de produits de santé. Par ailleurs, le pharmacien doit, sur la base d’une obligation de résultat :
- satisfaire à son devoir d’information et de conseil du patient ;
- respecter les droits des patients à l’égard des données qu’il traite ;
- assurer la protection de la vie privée des patients, la sécurité et la confidentialité des données traitées (recours à un hébergeur agréé, le cas échéant) ;
- respecter les règles spécifiques du commerce électronique (CGV, mentions légales etc. à l’exception du droit de rétractation).
Il doit préciser, dans son cahier des charges à destination de l’éditeur auquel il confie la réalisation de son site, l’ensemble des prérequis et fonctionnalités tels qu’issus de l’arrêté et soigner la rédaction du contrat. En outre, les textes précisent que le pharmacien est responsable :
- du site qu’il édite et des conditions dans lesquelles l’activité de commerce électronique de médicaments s’exerce (il doit donc veiller à scrupuleusement encadrer ses sous-traitants et prestataires par la voie contractuelle) ;
- des dispensations de médicaments effectuées au moyen de son site et du suivi de celles-ci (retranscription dans son logiciel métier).
Marguerite Brac de la Perrière
Lexing Droit Santé numérique
(1) Depuis l’arrêt CJCE du 11-12-2003 aff. C-322/01 DocMorris.
(2) CSP, Art. L5125-33 et s.
(3) CSP, Art. R5125-70 et s.
(4) CSP, Art. R4235-1 à R4235-77.
(5) Arrêté du 20-6-2013.
(6) Autorité de la consurrence, Avis 13-A-12 du 10-4-2013.