Economie juridique
Jurisprudence
Bien gérer la phase précontentieuse d’un différend
Des factures impayées pour un montant de 845 368 euros
Transpac, filiale de France Télécom, fournit des prestations de collecte nationale de trafic internet à la société Nerim, fournisseur d’accès par ADSL.. Ce dernier ne s’estimant pas satisfait des conditions techniques et commerciales du service fourni, suspend le paiement de ses factures, puis prononce la résiliation du contrat.
Après avoir mis en demeure Nerim de lui régler le solde de ses factures s’élèvant à 845 368 euros, Transpac saisit en référé le Tribunal de commerce de Paris pour obtenir le paiement des factures à titre de provision. La suspension de l’obligation de paiement est ordonnée, sous réserve que Nerim engage une procédure au fond dans les huit jours (1).
Saisie par Transpac de cette ordonnance, la Cour d’appel de Paris souligne que la demande de paiement de Transpac, qui produit le contrat et les factures, est justifiée dans son principe et dans son montant, alors que Nerim n’a contesté ni les factures, ni la mise en demeure de Transpac. Dès lors, la Cour estime que l’obligation de paiement pesant sur Nerim n’est pas sérieusement contestable au sens de l’article 873 du NCPC (2).
L’enjeu
La gestion de la phase pré-contentieuse d’un différend peut s’avérer lourde de conséquences.
Contre une provision de 10 millions d’euros de dommages et intérêts
En appel, Nerim invoque divers manquements de Transpac aux règles de la concurrence et estime avoir subi un préjudice considérable. Elle demande à la Cour de condamner Transpac à lui verser une somme de 10 millions d’euros à titre de provision sur les dommages et intérêts que le juge du fond devrait lui accorder, espérant ainsi obtenir la compensation entre sa dette et la créance invoquée.
Mais la Cour relève que la créance indemnitaire invoquée par Nerim ne peut constituer une contestation sérieuse de son obligation de payer, car les griefs invoqués par Nerim et leurs conséquences sont eux-mêmes sérieusement contestables et relèvent du débat devant le juge du fond.
L’arrêt infirme donc la décision de référé en toutes ses dispositions et condamne Nerim à payer à Transpac, à titre de provision, la somme de 845 368 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure de Transpac (38 183 euros à la date de l’arrêt).
La société Nerim est donc condamnée à payer la totalité des factures, dans l’attente du jugement au fond, à défaut d’avoir contesté celles-ci et d’avoir notifié son préjudice à son cocontractant avant de prononcer la résiliation du contrat.
Les conseils
Il est indispensable de contester dès réception toute facture émise par le cocontractant qui n’exécute pas correctement ses obligations et de lui notifier les préjudices qui résultent de ces inexécutions.
Notes
(1) TC Paris, ordonnance du 21 janvier 2004
(2)CA Paris 4 mars 2005 SA Transpac / SARL Nerim
Paru dans la JTIT n°42-43/2005 p.7