Secteur télécoms – Certaines dispositions de la loi renforçant les droits des consommateurs impactent très directement le secteur télécoms, comme celles relatives au démarchage téléphonique, au droit de rétractation et à ses conséquences sur la portabilité des numéros ou encore les services à valeur ajoutée. Le projet de loi, porté par le Ministre délégué à la consommation Benoît Hamon, adopté par le Parlement le 13 février dernier, n’entrera pas en vigueur immédiatement, le Conseil Constitutionnel ayant été saisi dans la foulée de son adoption.
Néanmoins, en l’état, cette loi va profondément réformer certains aspects du droit de la consommation, notamment par la création de l’action de groupe, tant attendue par certains et tellement décriée par d’autres, qui pourra être exercée y compris dans le secteur télécoms, qui défraye régulièrement la chronique.
Outre qu’elle introduit une définition du consommateur, qui ne peut désormais plus qu’être « (…) une personne physique qui agit pour des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale », la loi renforce également les obligations précontractuelles d’information sur les produits et les services instaurant une obligation de résultat à la charge du professionnel, dont la responsabilité serait engagée par un consommateur au motif que ces obligation n’auraient pas été correctement respectées.
La loi modifie aussi les dispositions existantes relatives à la vente à distance, en introduisant, d’une part, la notion de « vente hors établissement » et, d’autre part, en allongeant la durée du droit de rétractation, qui passe de 7 à 14 jours. Cependant, la loi exclut du champ d’application de ces dispositions « (…) les contrats conclus avec des opérateurs de télécommunications pour l’utilisation des cabines téléphoniques publiques ou aux fins d’une connexion unique par téléphone, internet ou télécopie, notamment les services et produits à valeur ajoutée accessibles par voie téléphonique ou par message textuel ».
Le secteur télécoms est visé à travers la liste d’opposition au démarchage téléphonique (Pacitel), qui est créée par les dispositions de l’article L.121-34 du nouveau Code de la consommation. Cette liste devra obligatoirement être consultée, notamment par les professionnels qui souhaiteraient réaliser des opérations de démarchage téléphonique, mais aussi par leurs prestataires de services, l’existence de cette liste devant être rappelée au consommateur lorsqu’un professionnel recueille auprès de lui ses coordonnées téléphoniques, y compris dans les contrats servant à ce recueil. Cette obligation ne s’applique cependant pas lorsqu’il s’agit pour un professionnel de contacter téléphoniquement un consommateur avec lequel il est déjà en relation. Enfin, toujours dans le secteur télécoms, la loi instaure l’interdiction de commercialiser des listes de prospection téléphonique qui contiendraient les coordonnées de consommateurs qui se seraient inscrits sur la liste d’opposition au démarchage téléphonique.
Toujours sur le terrain du démarchage téléphonique dans le secteur télécoms, sont désormais interdites les pratiques consistant pour les démarcheurs à masquer leur numéro de téléphone.
Dans l’hypothèse d’une demande de portage de numéro d’appel, consécutive à une souscription à distance, par voie de démarchage téléphonique ou de vente hors établissement, les dispositions du nouvel article L.121-83-2 instaurent des règles particulières en matière de remboursement des sommes dues au consommateur ou au professionnel, d’une part, et de restitution du matériel déjà livré par le professionnel au consommateur.
Le délai de présomption que les défauts de conformité affectant un bien existaient au moment de sa délivrance, est porté de 6 mois à 24 mois par les dispositions nouvellement adoptées de l’article L.211-7 du Code de la consommation consacré à la garantie légale de conformité.
Dans le cadre de la fourniture de contenus numériques non fournis sur support matériel, sont encadrées les pratiques des professionnels consistant à assimiler à un consentement express du consommateur son silence à l’ajout d’options payantes non sollicitées sur son offre de base. Ainsi, les dispositions de l’article L.114-1 du Code de consommation imposent-elles désormais au professionnel de rembourser ces sommes supplémentaires si le consommateur le lui demande.
Le secteur télécoms est également concerné à travers les opérations de prospection directe, notamment par SMS. Le champ d’application de la prospection directe est élargi aux opérations consistant à solliciter les consommateurs en leur demandant d’appeler ou d’envoyer un SMS vers un numéro surtaxé .
La réglementation de numéros à valeur ajoutée est modifiée par les dispositions de la section 7 du chapitre 1er du titre II du livre 1er du code de la consommation. Ainsi, le consommateur doit être en mesure d’identifier, à partir du numéro d’appel ou du SMS d’un professionnel utilisant de tels numéros à valeur ajoutée, le nom du produit ou du service accessible à ce numéro d’appel ou de SMS, sa description sommaire, le nom du fournisseur, son site internet, son adresse, ainsi que l’adresse et le numéro de téléphone auxquels le consommateur peut adresser ses réclamations. Cette identification doit pouvoir être faite à partir d’un outil mis gratuitement à disposition du consommateur par le professionnel.
L’accès à cet outil doit, par ailleurs, rester possible pendant une durée de douze mois au moins à compter de l’achat du bien ou du service et son existence, et les moyens permettant d’y accéder, doivent être indiqués sur le site internet du professionnel.
Les professionnels utilisant ces numéros à valeur ajoutée ne peuvent pas s’opposer à la communication et à la publication, par des tiers, des informations prévues ci-dessus, qu’ils doivent, par ailleurs, mettre à jour en fonction des évolutions permettant la modification, avec un préavis suffisant, de l’outil mis à disposition des consommateurs, sous peine de suspension, voire de résiliation, du contrat conclu avec l’opérateur de communications électroniques ou son abonné.
Mais le secteur télécoms est directement impacté par d’autres dispositions de cette réforme. En effet, est légalement consacrée l’obligation pour les opérateurs de communications électroniques, non seulement de mettre à disposition de leurs clients, un moyen leur permettant de signaler les sollicitions téléphoniques ou par SMS non souhaitées, mais également la possibilité de mutualiser ces informations.
Par ailleurs, les fournisseurs de services téléphoniques au public doivent proposer aux consommateurs une option gratuite afin de bloquer les communications à destination de certaines tranches de numéros à valeur ajoutée, telles qu’elles seront définies par un arrêté conjoint du ministre chargé de la consommation et de l’économie numérique et de l’Arcep.
Enfin, la loi renforce considérablement l’arsenal et le montant des sanctions, tant administratives que pénales, pouvant être infligées aux professionnels par les différentes autorités de contrôle compétentes, notamment, pour le secteur télécoms, l’Arcep, ce renforcement pouvant aller jusqu’à une multiplication par un facteur 10, voire parfois plus encore, des amendes encourues.
Frédéric Forster
Lexing Droit Télécoms