Logiciels libres ou propriétaires ? La voie n’est pas qu’alternative. Il est possible d’effectuer des gains de productivité grâce aux composants sous licence libre en tenant compte des effets juridiques.
Particulièrement dans un temps de restrictions budgétaires, de nombreuses entreprise de services du numérique (« ESN ») (anciennement sociétés de services informatiques ou SSII) souhaitent réduire les coûts de développement tout en préservant leur marge.
La solution technique consiste à utiliser des composants sous licence libre, prêts à l’emploi et de les intégrer au livrable commandé par le client.
Certains composants sous licence libre, une fois modifiés, transformés deviennent eux-mêmes soumis à la licence libre d’origine. C’est l’effet « contaminant » ou « viral », notamment prévu par les licences de type « general public license » ou GPL. Or, sur le bon de commande et même dans le contrat, lorsqu’il en existe un, avec le client, aucune stipulation ne figure concernant l’usage de composants sous licence libre.
Un client qui a commandé un logiciel « propriétaire » peut évidemment contester la livraison d’un logiciel qui se révèle finalement « libre ». Pour ce client, outre la non-conformité à la commande, c’est surtout le risque de divulgation et de fuite de son savoir-faire qu’il peut craindre en raison du principe de libre redistribution du logiciel libre (1).
Selon les licences applicables, et même pour la licence GPL version 3, il existe des solutions pour utiliser des composants tout en paralysant l’effet contaminant. Ainsi, le cabinet assiste-t-il régulièrement de nombreuses ESN pour :
- apporter son éclairage sur l’interprétation des licences libres existantes et leur effet contaminant ou pas ;
- la mise en place en interne d’une politique relative à l’utilisation des logiciels libres ;
- la rédaction d’une charte à destination des développeurs informatiques quant à l’usage de ces composants sous licence libre ;
- réorienter sa politique commerciale et mettre à jour ses conditions contractuelles relativement à l’usage de composants libres.
Dans le respect des licences applicables, l’ESN va pouvoir utiliser les composants qui l’intéressent tout en identifiant les éléments les plus différenciant qu’elle exploitera en mode « propriétaire ».
Au-delà, des aspects techniques et juridiques, il y a donc un intérêt directement économique pour l’ESN qui va pouvoir travailler sur une stratégie de patrimonialisation de ses actifs incorporels « propriétaires ».
Eric Le Quellenec
Lexing Droit Informatique
(1) Cass. 1e civ. 13-12-2005 n° 03-14003 ; CA Paris. 16-09-2009 RG n°04-24298.