L’hébergeur au sens classique du terme ou en environnement cloud est juridiquement le dépositaire des données incorporelles du client au sens de l’article 1915 du Code civil.
L’hébergeur en a à ce titre la garde et a une obligation de restitution en fin de contrat. Il peut être condamné s’il ne procède pas à cette restitution dans des délais normaux (1).
En cas de frais exposés par l’hébergeur pour la restitution des données, il peut prévoir une facturation spécifique pour cette prestation.
D’ailleurs même si cela n’est pas une obligation légale, la plupart des contrats d’hébergement comprennent en pratique une clause de réversibilité laquelle encadre les modalités technique, économique et juridique de restitution des données.
En présence ou pas d’une telle clause, la question se pose pour l’hébergeur de pouvoir « retenir » les données si le client n’est pas à jour de ses paiements.
En l’absence de clause spécifique. Le droit de rétention peut s’appliquer même sans clause spécifique. Il faut préciser le lien de connexité entre l’objet de la prestation et le prix impayé conformément à l’article 2286 du Code civil.
Le droit de rétention bien connu dans l’hypothèse du garagiste impayé à l’égard de la voiture réparée n’a pas été aussi facilement transposé dans le monde de l’immatériel. La première jurisprudence le consacrant ne date que de 2010 (2).
En présence d’une clause spécifique. Le client débiteur pourra plus difficilement contester une clause clairement stipulée avec des cas de rétention bien bornés.
Cependant, il existe de nombreuses hypothèses où un tel droit de rétention soit n’est pas possible, par exemple en cas de procédure collective (3), soit exposerait le client dont les données sont hébergées à de graves difficultés par exemple dans le domaine médical (4).
L’hébergeur doit donc se garder d’appliquer systématiquement un droit de rétention en cas d’impayé, au risque de voir sa propre responsabilité engagée.
Pour l’hébergeur qui souhaiterait donc se réserver une telle garantie sur les données dont il a la garde, il convient donc :
- de travailler au périmètre et aux modalités de mise en œuvre de la clause de rétention avec la plus grande rigueur ;
- de fixer par un livret d’implémentation à destination des équipes marketing et juridique, le scénario par escalade justifiant un tel droit de rétention.
Eric Le Quellenec
Lexing Droit Informatique
(1) TC Paris Ord. Réf. 20-3-2002.
(2) CA Toulouse 12-10-2010, RG n°08-05858.
(3) Article L. 622-13 Code de commerce.
(4) Décret 2011-246 du 4-3-2011.