Le 23 décembre 2014, l’Etat français et la Caisse des dépôts et consignations ont signé la convention destinée à mettre en œuvre la création du fonds souverain de la propriété intellectuelle (FSPI), confirmant ainsi la détermination étatique à protéger les brevets français.
La création de ce nouvel outil de valorisation des brevets français intervient 4 ans après la création de France Brevets, fonds d’investissement gestionnaire du FSPI qui a pour mission d’acquérir des droits sur les brevets issus de la recherche française, de les regrouper en grappes technologiques puis d’octroyer des licences à prix de marché aux entreprises françaises, essentiellement des petites et moyennes entreprises.
Les grappes technologiques consistent à assembler plusieurs brevets issus d’origines différentes pour proposer aux éventuels utilisateurs une offre à plus forte valeur ajoutée.
Complémentaire au dispositif de France Brevets, le fonds souverain vise à élargir l’accès à la propriété intellectuelle, notamment en facilitant l’octroi de licences aux petites entreprises, et diminuer le risque concernant la diffusion commerciale des innovations. L’Etat souhaite en effet « réaliser les acquisitions de brevets qu’il juge nécessaires pour lever les barrières à l’entrée des marchés, et favoriser le développement de l’industrie française par la diffusion des innovations » .
Les compétences et missions du FSPI et de France Brevets étant proches, ceux-ci doivent travailler en synergie afin d’améliorer la diffusion des innovations par la valorisation de la propriété intellectuelle issue de la recherche française.
Plus concrètement et à l’image de France Brevets, le fonds souverain aura pour mission l’acquisition de brevets d’entreprises françaises et européennes et l’octroi de licences à prix de marché aux entreprises françaises. L’accord conclu avec les entreprises pourra comporter une prestation de diagnostic et de conseil.
Le fonds souverain aura également pour objectif d’inclure dans les normes internationales des brevets issus de la recherche française pour que leur valeur et leurs perspectives commerciales soient rehaussées.
Afin de remplir ses objectifs, le FSPI a été doté d’un budget de 100 millions d’euros.
L’effort budgétaire octroyé par l’Etat, nonobstant les difficultés financières actuelles, s’inscrit dans un contexte international plus général. Les puissances mondiales se mènent en effet une véritable guerre des brevets et créent des fonds d’investissement pour la valorisation de leurs brevets nationaux.
La stratégie de l’Etat français s’inscrit donc dans ce mouvement d’acquisitions des inventions afin d’en assurer la défense et de bénéficier des retombées économiques en France.
Néanmoins, la création du fonds souverain ne va pas sans rappeler la problématique d’origine américaine des « patent troll », entités créées dans le seul but d’acquérir des brevets pour ensuite octroyer des licences d’exploitations à des tiers ou introduire des actions en justice sur le fondement d’une violation de ces derniers.
Bien que le « patent troll » permette de mieux protéger les brevets individuels, leur effet paralysant sur l’innovation s’est déjà fait sentir aux Etats-Unis, notamment en raison de la menace judiciaire permanente qui pèse sur les entreprises innovantes.
En outre, il est probable que face à la création d’un fonds d’investissement français, les autres Etats européens créent des entités équivalentes pouvant entraîner une spirale protectionniste au détriment de l’innovation.
Virginie Brunot
Juliette Dhuyser
Lexing Droit Propriété industrielle