La vente de médicaments en ligne subit un nouveau rebondissement avec l’annulation de l’arrêté relatif aux bonnes pratiques de dispensation des médicaments par voie électronique, autorisée en France depuis le 2 janvier 2013.
Nullité de l’arrêté du 20 juin 2013 sur le fondement de l’illégalité externe. L’arrêté, entré en vigueur le 12 juillet 2013, a fait suite à l’ordonnance n°2012-1427 du 19 décembre 2012, transposant la directive communautaire 2011/62/UE, et au décret n°2012-1562 du 31 décembre 2012 (1).
L’arrêté portait sur les bonnes pratiques à respecter s’agissant de la vente de médicaments en ligne, en particulier s’agissant de l’identification de l’officine, son hébergement, la protection des données, le droit de rétractation ou encore les réclamations.
Le Conseil d’Etat avait déjà annulé l’article 7 de l’ordonnance qui limitait la possibilité de vente en ligne aux seuls médicaments de médication officinale qui peuvent être présentés en accès direct au public en officine, alors que la directive visait tout médicament non soumis à prescription médicale (2). La loi n°2014-201 du 24 février 2014 est venue rectifier ce point.
Dans son arrêt du 16 mars 2015 (3), le Conseil d’Etat a considéré que cet arrêté pris par Madame le Ministre de la santé en application de l’article L5121-5 du Code de la santé public (CSP), était entaché d’illégalité en raison :
- d’une part de l’incompétence de la Ministre de la santé, qui n’avait pas pouvoir pour définir les modalités d’exercice du commerce électronique de médicaments (4) ;
- d’autre part du non-respect de la procédure de notification à la Commission européenne des règles techniques édictées par un Etat membre en application de l’article 8 de la directive 98/34/CE modifiée (5).
Quel avenir pour la vente de médicaments en ligne ? La nullité a un effet rétroactif. Concrètement cela signifie que les pharmaciens engagés dans la voie du commerce électronique, 235 à ce jour, n’ont plus l’obligation de respecter les dispositions de cet arrêté.
L’Ordonnance n°2012-1427 et le Décret n°2012-1562 codifiés au CSP (1) restent en vigueur, et toute violation entrainera une sanction financière (6) :
- l’activité est réservée aux seuls pharmaciens titulaires d’une officine ou gérants d’une pharmacie mutualiste ou de secours minière exclusivement pour leurs membres, après autorisation par le directeur général de l’ARS (7) territorialement compétent et information de l’Ordre des pharmaciens ;
- tous les médicaments non soumis à prescription médicale sont concernés ;
- le site internet doit contenir les coordonnées de l’ANSM (8), un lien hypertexte vers les sites de l’Ordre national des pharmaciens et du Ministère de la Santé, sur lesquels se trouvent la liste des e-pharmacies et le logo UE ;
- le pharmacien doit informer l’ARS de toute modification de sa situation.
Comment seront édictées les bonnes pratiques ? Un nouvel arrêté de la Ministre sur la dispensation des médicaments est envisageable. Mais seul un décret en Conseil d’Etat pourra compléter le régime existant sur les autres points (4). Enfin, à compter du 1er juillet 2015, les sites de commerce électronique de médicaments devront se doter du logo commun européen mis en place par le Règlement d’exécution n°699/2014.
Marguerite Brac de La Perrière
Aude Latrive
Lexing Droit Santé numérique
(1) CSP, art. L5125-33 et s., art. R5125-70 et s.
(2) CE 17-7-2013, n°365317.
(3) CE 16-3-2015, n° 370072, 370721, 370820.
(4) CSP, art. L.5121-5 et L5125-41.
(5) Dir. 98/34/CE modifiée par la directive 98/48/CE.
(6) CSP, art. L5424-4 9°.
(7) Agence Régionale de Santé (ARS).
(8) Agence Nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).