Les tests ADN ont révolutionné les techniques de preuve et vont jusqu’à modifier la manière d’appréhender l’enquête.
L’imagerie, qu’il s’agisse des vidéos ou des photographies, a, depuis plus de deux décennies, joué une place prépondérante dans l’établissement de la preuve.
La vidéo-protection dans les lieux publics et la vidéo-surveillance dans les espaces privés (1), le recours de plus en plus réguliers aux cours des procès aux images prises depuis des smartphones ou depuis des caméras miniatures, l’image est devenue un mode commun de preuve permettant, généralement sans contestation possible, d’identifier les auteurs et de s’assurer de leur participation à l’infraction.
Depuis peu, toutefois, le recours à l’imagerie dans l’établissement de la preuve judiciaire pourrait connaître une petite révolution grâce à deux innovations venues d’outre-Atlantique.
La première s’inscrit dans une évolution consistant à suivre au plus près l’action de la police. Déjà munis de caméras dans les voitures de patrouille de nombreuses villes américaines, les agents de police vont désormais se voir affublés d’une caméra portative accrochée à leur veston.
L’objectif est double, rapporter la preuve de la commission d’un délit flagrant lors d’une interpellation, mais aussi, et peut être même surtout, policer les méthodes policières et, en cas d’abus, permettre sa caractérisation.
Le procédé a déjà fait la preuve de son efficacité. Il y a peu, en Caroline du Sud, un officier de police a été inculpé de meurtre après que la vidéo a démontré l’inanité de l’argument de la légitime défense soutenue par le prévenu et sa hiérarchie.
Au-delà de ce cas ultime on peut également percevoir tout l’intérêt que pourrait revêtir la transposition de cette mesure en France. Ne serait-ce qu’en termes de procédure : s’assurer de la bonne réalisation d’une perquisition, vérifier qu’une fouille s’est faite sur des critères objectifs, examiner le respect des délais de placement en garde à vue, le champ d’application est gigantesque, mais les dangers qu’elle recèle sur les libertés publiques ne sont pas non plus à minorer.
L’autre innovation vient quant à elle du ciel. Depuis un an est né aux Etats-Unis un cabinet d’un genre nouveau réunissant un avocat féru de nouvelles technologies et un géographe amateur de droit.
Leur activité ? Scruter les images prises par les 150 satellites placés en orbite afin de démontrer l’existence de délits ou de fautes civiles ou, à l’inverse, leur inexistence.
Grâce à cette méthode, les deux hommes mettent en évidence l’existence de délits environnementaux, permettent de trancher des conflits de voisinage, d’identifier les auteurs d’un vol ou, a contrario, de s’assurer qu’il n’y a pas eu de vol. Il y a quelques mois les images satellitaires ont permis d’établir qu’un véhicule déclaré volé était, en fait, dissimulé au bout du champ…de son propriétaire.
Là encore, la technique ne devrait pas tarder à traverser l’Atlantique. D’ailleurs, en théorie, chacun peut y recourir. Les images satellitaires sont libres d’accès, parfois gratuites, souvent payantes, elles sont presque toutes consultables sur internet.
Encore un peu de patience et ce sera l’avènement de l’avocat-géographe.
Virginie Bensoussan-Brulé
Julien Kahn
Lexing Droit presse et pénal numérique
(1) Voir Livre blanc « Vidéoprotection : mieux comprendre le cadre réglementaire et les réalités d’installation et d’usage », novembre 2014, GPMSE, Aasset Security-TKH et Alain Bensoussan-Avocats (Disponible en accès libre).