Le projet de loi pour une République numérique contient une exception en faveur du Text and Data Mining (TDM).
L’Assemblée nationale a adopté en première lecture le 26 janvier 2016 le projet de loi pour une République numérique (TA n°663) à 356 voix pour et 1 contre (1).
Ce texte porté par Axelle Lemaire, secrétaire d’Etat chargée du Numérique, a pour objectif de faire du numérique une « nouvelle opportunité de développement, de croissance et de partage pour notre pays, nos entreprises et nos concitoyens » en :
- favorisant la circulation des données et du savoir ;
- œuvrant pour la protection des individus dans la société du numérique ;
- garantissant l’accès au numérique pour tous.
Dans le cadre du développement de l’« Economie du savoir », les députés ont non seulement accueilli favorablement le texte de l’article 17 créant le cadre juridique du partage des données et écrits scientifiques mais en plus, ils ont introduit une exception en faveur de l’exploration de textes et de données, ou Text and Data Mining (TDM), pour les besoins de la recherche publique (article 18 bis nouveau).
Une exception au droit d’auteur en faveur du Text and Data Mining (TDM) – Ce nouvel article 18 bis ajoute à la liste de l’article L.122-5 du Code de la propriété intellectuelle une dixième exception au droit d’auteur en autorisant :
« Les copies ou reproductions numériques réalisées à partir d’une source licite, en vue de l’exploration de textes et de données pour les besoins de la recherche publique, à l’exclusion de toute finalité commerciale. Un décret fixe les conditions dans lesquelles l’exploration des textes et des données est mise en œuvre, ainsi que les modalités de conservation et de communication des fichiers produits au terme des activités de recherche pour lesquelles elles ont été produites ; ces fichiers constituent des données de la recherche ».
Une exception au droit du producteur de base de données est également ajoutée, dans des termes proches, à l’article L.342-3 du Code de la propriété intellectuelle. Cette exception TDM est encadrée juridiquement par trois limitations :
- les opérations de fouille de textes et de données ne peuvent s’effectuer qu’à partir de corpus dont les contenus ont été acquis de façon licite (par exemple être titulaire d’un abonnement en ligne) ;
- le TDM ne peut être pratiqué que pour « les besoins de la recherche publique » ;
- est exclue « toute finalité commerciale » (cette dernière limitation mériterait d’être précisée pour une plus grande clarté).
Cette exception de Text and Data Mining a été soutenue par des députés d’appartenance politique différente, qui ont pris la mesure de l’enjeu du TDM pour la recherche française et entendu les communautés scientifiques françaises qui se sont notamment exprimées dans le cadre de la consultation publique (2). Cette voix s’est également affirmée par l’intermédiaire de la CPU (Conférence des Présidents d’Université) et du CNRS qui ont demandé le 21 janvier 2016 au Parlement « d’inscrire dans la loi des mesures claires et fortes montrant l’engagement de la Nation pour une recherche publique libre et ouverte » notamment par « la réintroduction d’un article sur la fouille de données ».
Le Gouvernement, quant à lui, avait justifié à plusieurs reprises, et notamment dans la synthèse officielle de la consultation publique, que « le droit européen ne permet pas actuellement de créer de nouvelles exceptions » au droit d’auteur et souhaité que la question du TDM soit abordée dans le cadre des travaux européens en cours. Axelle Lemaire avait dans le cadre des débats au Parlement réitéré cette position et n’avait pas soutenu les amendements proposant l’insertion du TDM.
L’adoption de cette exception « TDM » au droit d’auteur n’est toutefois pas encore définitive, le texte va être examiné au Sénat dans le courant du mois d’avril 2016, puis dans le cadre d’une commission mixte paritaire ou d’une nouvelle lecture devant l’Assemblée nationale.
Une mission Text and Data Mining confiée au GFII – Conscient de l’enjeux primordial du TDM, le Gouvernement a, sous la double impulsion de Fleur Pellerin, ministre de la Culture et de la Communication, et de Thierry Mandon, secrétaire d’État chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, confié à Charles Huot, président du Groupement français des industriels de l’information, une « mission de concertation et de proposition pour faciliter le développement du recours en France aux technologies de fouille et d’exploration de textes et de données » (TDM) (3).
Charles Huot a pour objectif de rechercher, d’ici le mois de mars 2016, un accord entre les acteurs intéressés, à savoir la communauté de la recherche publique et les éditeurs scientifiques.
Le Text and Data Mining est au cœur des avancées législatives françaises et européennes et cette mission s’inscrit également dans ce mouvement.
Lexing Alain Bensoussan Avocats
Lexing Droit Propriété intellectuelle
(1) Texte adopté n°663 26-1-2016, Projet de loi pour une République numérique.
(2) Voir le Post d’Alain Bensoussan du 16-10-2015.
(3) Communiqué de presse du ministère de la Culture et de la Communication du 21-1-2016.