Dans le numéro 49 de la revue PLANETE ROBOTS, Alain Bensoussan analyse l’ algorithme post-bac qui a fait l’objet d’un rapport critique de la Cour des comptes.
Quand les algorithmes interviennent dans la conduite de politiques publiques, la transparence doit être de mise. Or un rapport de la Cour des comptes pointe les limites de l’ algorithme post-bac, dispositif utilisé par la plateforme numérique publique APB pour mettre en adéquation les vœux de quelques 800 000 lycéens et étudiants et les formations universitaires a laissé cet été près de 86 000 candidats sans proposition.
La plateforme APB repose sur un algorithme « d’appariement » – ou algorithme d’affectation – qui croise les préférences exprimées par les établissements et les candidats pour leur proposer une admission dans un établissement d’enseignement supérieur correspondant au meilleur choix possible compte tenu des préférences indiquées et des possibilités existantes.
Une fois les vœux définitivement enregistrés, un traitement automatisé est mis en œuvre afin de classer les candidats aux formations « sélectives » (BTS, DUT, Classes préparatoires aux grandes écoles) et « non sélectives » (1re année de licence).
S’agissant des formations non sélectives, le classement est effectué au moyen d’un algorithme à partir des critères issus de l’article L. 612-3 du Code de l’éducation (origine géographique du candidat, situation de famille, ordre de ses vœux). En dernier recours, pour départager les candidats en surnombre disposant encore d’un même niveau de priorité, l’algorithme programme un tirage au sort (« classement aléatoire »).
Dans un rapport publié en octobre 2017 (disponible sur www.ccomptes.fr), la Cour des comptes a décortiqué les mécanismes « opaques » de l’ algorithme post-bac devenu un « outil de sélection et d’orientation ». Pour la Cour, le problème principal tient au fait qu’APB a été pensé et conçu en 2003 pour gérer l’admission dans des filières sélectives, à l’aide d’un algorithme dit « d’affectation ».
Or à sa généralisation en 2009, il a dû intégrer l’admission en licence, « filière majoritairement non sélective », ce qui a nécessité une adaptation de l’outil grâce à l’introduction d’un second algorithme dit « de classement » ayant pour seule vocation de traiter les candidatures à la licence.
Pour la Cour, les modalités de fonctionnement de cet algorithme de classement « apparaissent peu transparentes et non conformes au Code de l’éducation ». Son fonctionnement est pourtant crucial s’agissant des licences universitaires en tension (Staps, médecine, droit, psychologie, etc.) qui « ne disposent pas de capacités d’accueil à la hauteur de la demande des candidats dans APB ». Ces dernières, en théorie non sélectives, font reposer sur la plateforme le soin de départager les candidats en surnombre selon le tirage au sort opéré par l’algorithme ; ce dispositif a été jugé dépourvu de base juridique par le Tribunal administratif de Bordeaux en juin 2016 (1).
La diffusion d’une circulaire, publiée au bulletin officiel du ministère de l’éducation nationale le 27 avril 2017, explicitant aux recteurs d’académie le principe du tirage au sort contenue dans l’algorithme sans le fonder juridiquement, n’a pas suffi.
Pour la Cour des comptes, « l’État ne peut plus aujourd’hui s’exonérer de la redéfinition légale et administrative du dispositif d’affectation dans l’enseignement supérieur, fragilisé par l’absence de base juridique, précisant son objectif, ses règles et la portée de son résultat ».
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Alain Bensoussan pour Planète Robots, « L’ algorithme post-bac décortiqué par la Cour des comptes », n°49, Janvier-Février 2018.