Le juge français est incompétent lorsqu’il s’agit de sanctionner des annonces en ligne en anglais.
Une société française créatrice et distributrice de vêtements, prétendant que sur Ebay figuraient des annonces de vente de vêtements reproduisant sa marque sans son autorisation, a fait assigner la plate-forme de commerce en ligne (Inc., Europe et France) en contrefaçon de marques et en réparation de son préjudice devant le Tribunal de Grande Instance de Paris.
Les juges du fond ont rejeté l’exception d’incompétence territoriale soulevée par la plate-forme de commerce en ligne, retenant que la seule accessibilité du site sur le territoire français suffisait à justifier leur compétence.
Mais la Cour de cassation, par arrêt du 29 mars 2011, a censuré l’arrêt au visa de l’article 46 du Code de procédure civile, estimant « que la seule accessibilité d’un site sur le territoire français n’est pas suffisante pour retenir la compétence des juridictions françaises », et qu’il est nécessaire de « rechercher si les annonces litigieuses étaient destinées au public de France ».
Sur renvoi après cassation, devant la Cour d’appel de Paris, le fabricant de vêtements soutenait que les annonces litigieuses étaient bien destinées au public de France, car l’usage de la langue anglaise est indifférent s’agissant de vente internet, que la plate-forme utilise une extension neutre en .com, que les photographies permettent d’identifier les articles, enfin et surtout car il était possible de se faire livrer en France, constats d’huissier à l’appui.
La Cour d’appel fait droit à l’argumentation développée par la société américaine Ebay Inc. (seule société Ebay exploitant le site Ebay.com) :
- le site et les instructions étant rédigés en langue anglaise,
- les prix des articles étant en dollars US, et
- les tailles des vêtements référencées en « inches ».
Enfin la preuve de la commercialisation en France ne résultant que d’une commande par un huissier effectuée dans la perspective de la procédure, en l’absence d’autre preuve d’acquisition par des internautes français, elle considère que les indices allégués par le fabricant de vêtements ne permettent pas de démontrer que les annonces litigieuses sont destinées au public Français.
En conséquence, elle décide qu’il n’existe pas, en l’espèce, un lien suffisant, substantiel ou significatif entre les faits délictuels et le dommage allégué sur le territoire français, et renvoie le fabricant de vêtements à mieux se pourvoir.