La Commission européenne a organisé une consultation sur le droit d’auteur entre fin 2013 et début 2014 qui a suscité un vif intérêt avec plus de 9 500 participations.
L’initiative du projet de réforme. S’appuyant sur le rapport publié en juillet 2014 qui fait état des réponses à cette consultation publique, la Parlementaire allemande Julia Reda a rédigé un projet de rapport qu’elle a présenté au Parlement Européen en janvier 2015 pour modifier la directive 2001/29/CE sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information (1).
La directive 2001/29/CE avait été adoptée pour modifier la législation relative au droit d’auteur et aux droits voisins et l’adapter aux évolutions technologiques. En se limitant à l’introduction de niveaux minimums de protection des droits ainsi qu’en prévoyant des exceptions facultatives au droit d’auteur, elle n’a pas permis d’harmoniser le droit d’auteur en Europe. De plus, ses termes et dispositions ne sont aujourd’hui plus adaptés aux pratiques culturelles à l’ère du numérique.
Pour pallier la fragmentation des lois nationales sur le droit d’auteur entre les différents Etats membres et endiguer l’insécurité juridique en résultant, Julia Reda suit l’avis du Président de la Commission européenne qui souhaite « briser les barrières nationales en matière de réglementation du droit d’auteur ».
Les principaux changements proposés. Aligner à 50 ans la durée de protection du droit d’auteur : le rapport propose que la protection du droit d’auteur soit de 50 ans (post-mortem pour les auteurs et à partir de l’enregistrement ou de l’interprétation pour les producteurs et les interprètes), au lieu de 70 ans pour les auteurs actuellement en France (2).
Introduction d’un titre unique en matière de droit d’auteur au niveau européen : comme le brevet unitaire européen ou la marque communautaire, le Rapport préconise l’introduction d’un titre directement et uniformément applicable pour les auteurs de l’Union Européenne, afin d’achever le marché unique numérique.
Rendre obligatoire les exceptions jusqu’à présent facultatives en droit d’auteur : ce changement concerne davantage les autres Etats membres que la France dans la mesure où en France, les exceptions prévues par la Directive sont codifiées à l’article L.122-5 du Code de la propriété intellectuelle comme l’exception de « copie privée » qui permet au copiste de reproduire l’œuvre pour son usage privé, l’exception de parodie, l’exception de courte citation etc. Le Rapport préconise que toutes exceptions prévues par la Directive s’appliquent uniformément, là où réside aujourd’hui une véritable disparité entre les différents Etats.
Créer de nouvelles exceptions au droit d’auteur ou élargir les exceptions existantes : pour s’adapter aux différentes évolutions technologiques et aux réseaux sociaux, Julia Reda propose la création de nouvelles exceptions comme celle permettant d’admettre uniformément la citation audiovisuelle, ou de rendre l’espace public libre de droit (exception dite de « liberté de panorama »). Elle recommande aussi de préciser que le référencement des œuvres au moyen d’un lien hypertexte n’est pas soumis à des droits d’auteur.
Mais pour beaucoup, le rapport Reda est empreint d’une coloration négative car son auteur est membre du Parti pirate allemand. Les ayants-droits (auteurs, sociétés de gestion collective) sont inquiets si l’impulsion du rapport Reda devait être suivie car le rapport ne mentionne pas la volonté de limiter le piratage.
Marie Soulez
Clémence Delebarre
Lexing Contentieux Propriété intellectuelle
(1) Projet de rapport 2014/2256(INI) du 15-1-2015.
(2) CPI, art. L.123-1.