L’ avatar est envisagé comme une émanation virtuelle de son utilisateur vis-à-vis duquel il n’aurait aucune autonomie.
Néanmoins, cette vision restrictive de la place de l’ avatar, dans les univers virtuels, ne semble plus correspondre à la réalité.
En effet, au sein des mondes virtuels, les avatars apparaissent de plus en plus autonome à l’égard de leurs utilisateurs et sont ainsi capables de réagir seuls face à l’environnement virtuel dans lequel ils évoluent et d’interagir avec les autres avatars, que leurs utilisateurs soient connectés ou non.
Face à cette évolution majeure persiste un vide juridique relatif au statut de l’ avatar « autonome » ainsi qu’au régime de responsabilité qui lui serait applicable.
Afin de réguler le comportement de l’ avatar au sein des univers virtuels, deux systèmes de responsabilité pourraient, par exemple, s’envisager :
- un système de responsabilité organisé exclusivement « in world », c’est-à-dire au sein même de l’univers virtuel ;
- un système de responsabilité « virtuelle » spécifique aux avatars, faisant de ce dernier un véritable sujet de droit autonome et responsable de ses actes.
Système de responsabilité « in world ». Au-delà de l’existence d’une « Déclaration des droits des Avatars » (1), publiée le 27 août 2000, par le concepteur d’univers virtuels persistants, Raphaël Koster, qui ne revêt aucune valeur juridique, il pourrait être envisagé d’organiser la responsabilité des avatars au sein même des univers virtuels via un système de responsabilité « in world ».
Le système de responsabilité « in world » est alors basé sur l’idée qu’il apparaît, d’une certaine manière logique d’apporter, une réponse « virtuelle » aux problèmes rencontrés au sein des mondes virtuels par les avatars.
La responsabilité des avatars pourrait alors être entièrement régie et organisée par les conditions générales d’utilisation (CGU) ou « Terms of Use » (TOS) applicables aux univers virtuels persistants.
Ainsi, les conditions générales d’utilisation étableraient la liste des comportements des avatars considérés comme étant illicites au sein de l’univers virtuel ainsi que les sanctions applicables à ces derniers. Il pourrait ainsi être envisagé de créer :
- des tribunaux virtuels, composés de magistrats-avatars, afin de juger les avatars dont le comportement contreviendrait aux dispositions des conditions générales d’utilisation ;
- des prisons virtuelles dans lesquelles les avatars, jugés coupables, purgeraient leurs peines.
Les sanctions, qui pourraient être infligées aux avatars, peuvent être multiples :
- dissolution de son patrimoine « virtuel » ;
- amendes « virtuelles » dans la monnaie de l’univers virtuel ;
- travaux d’intérêt généraux « virtuels » ;
- excuses publiques dans l’univers virtuel, notamment dans les cas d’injures ou propos diffamatoires. ;
- etc.
Si l’idée d’un système de responsabilité « in world » apparaît séduisante, elle se heurte néanmoins à de réelles difficultés de mise en œuvre et ne pourra reposer que sur la volonté ferme de l’éditeur de l’univers virtuel et sur la coopération totale des utilisateurs.
Système de responsabilité « virtuelle » des avatars ». A l’image de la consécration de l’existence d’une personnalité juridique ainsi que des responsabilités qui en découlent, à des sociétés, il pourrait être envisagé de reconnaître aux avatars « autonomes » une personnalité juridique à part entière et les rendre ainsi pleinement responsables de leurs actes et de leurs propos au sein des univers virtuels.
En faveur de cette possibilité de reconnaissance, le « Conseil d’Etat avait d’ailleurs souligné, dans son rapport du 2 juillet 1998 « Internet et les réseaux numériques », l’intérêt de définir précisément la notion de « personnalité virtuelle » aux côtés de celle de « civilité mondiale » dans l’optique d’une définition du « citoyen numérique ».
Ainsi, il serait opportun de s’interroger sur un cadre légal spécifique aux avatars afin de leur attribuer une personnalité juridique et faire de ces êtres virtuels, des êtres responsables juridiquement.
Lexing Alain Bensoussan Avocats
Amandine Porée
Lexing Droit du numérique
(1) Déclaration du 27-8-2000.