Le défaut de mise en œuvre d’une clause de conciliation préalable n’est pas régularisable en cours d’instance.
Une absence de médiation constituant une fin de non-recevoir…
Le défaut de mise en œuvre d’une clause de conciliation préalable n’est pas régularisable en cours d’instance. C’est ce qui ressort de l’arrêt de la Cour de cassation du 6 octobre 2016.
En l’espèce, deux sociétés avaient conclu un contrat de bail portant sur un local d’un centre commercial. Deux clauses du contrat de bail doivent être relevées :
- la clause de prise d’effet du bail. Celui-ci prenait effet à la date de livraison au preneur (au moins 3 mois avant l’ouverture au public) ;
- la clause de médiation qui imposait aux parties de recourir à une médiation avant « toute instance judiciaire ».
Or, le preneur n’a jamais pris possession des lieux, et ce malgré plusieurs mises en demeure du bailleur. Ce dernier a alors décidé de l’assigner en vue d’obtenir le paiement de l’indemnité d’immobilisation contractuelle.
Le bailleur s’est vu débouté en première instance pour ne pas avoir mis en œuvre la clause de médiation. Suite à cet échec, il a engagé une procédure de médiation pour régulariser la situation. La cour d’appel a considéré que la situation était régularisée et a accueilli sa demande. Le preneur à bail a alors formé un pourvoi en cassation.
Par sa décision du 10 octobre 2016, la Cour de cassation a rejeté l’action du bailleur. Selon la Haute juridiction, la situation donnant lieu à la fin de non-recevoir tirée du défaut de mise en œuvre de la médiation n’est pas régularisable en cours d’instance.
… insusceptible de régularisation en cours d’instance
Le fait que le défaut de mise en œuvre d’une clause de conciliation est une fin de non-recevoir est une position constante depuis 2003 (1). L’intérêt de cet arrêt réside dans le rejet d’une possible régularisation de ce type de situation.
Pour rappel, l’article 126 du Code de procédure civile dispose (2) :
« Dans le cas où la situation donnant lieu à une fin de non-recevoir susceptible d’être régularisée, l’irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue ».
C’est sur ce fondement que la Cour d’appel de Bordeaux avait accueilli les prétentions du bailleur. Elle avait ainsi considéré que la cause d’irrecevabilité avait disparu au moment où elle devait statuer, en raison de la procédure de médiation engagée par le bailleur en cours d’instance.
Cette position jurisprudentielle était d’ailleurs celle de la Cour de cassation jusqu’en 2014 (3). Jusqu’alors le demandeur pouvait exécuter une clause de conciliation même en cours d’instance. Une telle démarche faisait disparaître la cause d’irrecevabilité que constitue l’absence de mise en œuvre de cette clause.
Mais l’arrêt de la Cour de cassation du 12 décembre 2014 (4) a opéré un revirement jurisprudentiel. Réunie en chambre mixte, la Cour de cassation a mis fin à ce courant et affirmé que ce type de situation n’était pas régularisable au sens de l’article 126.
C’est dans la droite ligne de cet arrêt de 2014 que s’inscrit le présent arrêt. Dans une formation différente de ce revirement, la Cour de cassation a fermement confirmé sa position sur ce point de droit.
Marie-Adélaïde de Montlivault-Jacquot
Thomas Noël
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(1) Cass. ch. mixte, 14-2-2003, n°00-19.423 et 00-19.424, M. X c/ M. Y.
(2) CPC, art. 126.
(3) Voir par exemple Cass. 2e civ., 16-12-2010, n°09-71.575, M. et Mme X c/ M. et Mme Y, Sté Fide et Sté Fime.
(4) Cass. ch. mixte, 12-12-2014, n°09-71.575, Sté Proximmo c/ Sté Arnal-Lafon-Cayrou.