Le Tribunal de grande instance (TGI) de Paris déclare nulle et non écrite la clause attributive de compétence au profit de tribunaux situés aux Etats-Unis figurant dans les conditions générales de la société Facebook Inc. (1).
La clause attributive de compétence au profit de tribunaux étrangers. Suite à la désactivation de son compte, un utilisateur français assigne la société Facebook Inc. devant le TGI de Paris pour en obtenir la réactivation. Les conditions générales de Facebook prévoyant une clause attributive de compétence au profit des tribunaux du comté de Santa Clara en Californie, la société Facebook Inc. soulève une exception d’incompétence relative au TGI de Paris devant le juge de la mise en état. Elle précise en outre, dans ses conclusions d’incident, que la loi sur les clauses abusives n’a pas vocation à s’appliquer à l’espèce, le contrat en cause n’étant pas un contrat de consommation et que, en tout état de cause, la clause attributive de compétence n’ayant pas pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des contractants elle ne saurait être considérée comme abusive.
Le demandeur considère à l’inverse que la clause attributive de compétence est une clause abusive au sens de l’article R.132-2 du Code de la consommation, qu’elle doit donc être réputée non écrite et que le juge français est, dès lors, compétent pour statuer sur le litige.
Le juge de la mise en état donne raison au demandeur, estimant que ce dernier est bien lié par un contrat de consommation, qu’en conséquence, au regard de la législation française, la clause attributive de compétence est abusive et doit être réputée non écrite et que dès lors, en application du règlement n°44/2001 du 22 décembre 2000, le TGI de Paris est compétent pour trancher le litige.
Caractère abusif de la clause attributive de compétence. Le juge de la mise en état, apprécie ici le caractère abusif de la clause attributive de compétence figurant dans les clauses générales de la société Facebook Inc.
L’article L.132-1 du Code de la consommation dispose que « dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ». L’article R.132-2 du même code précise en outre que sont présumées abusives les clauses ayant pour objet ou pour effet « de supprimer ou d’entraver l’exercice d’actions en justice ou des voies de recours par le consommateur ».
Au regard de ces dispositions, le juge commence par caractériser le contrat conclu entre la société Facebook Inc. et le demandeur ; il relève ainsi tout d’abord la qualité de professionnel de la société Facebook Inc. malgré la gratuité du service proposé, puis l’absence de capacité de négociation des clauses par l’utilisateur. Il en déduit donc qu’il s’agit d’un contrat d’adhésion auquel la législation sur les clauses abusives a bien vocation à s’appliquer.
Dès lors, le juge estime que la clause litigieuse, ayant pour effet d’obliger le souscripteur en cas de conflit avec la société, à « saisir une juridiction particulièrement lointaine et à engager des frais sans aucune proportion avec l’enjeu économique du contrat souscrit pour des besoins personnels ou familiaux », est une clause abusive dans la mesure où elle est de nature à dissuader le consommateur d’exercer toute action devant les juridictions concernant l’application du contrat et donc à le priver de tout recours à l’encontre de la société Facebook Inc.
Marie-Adélaïde de Montlivault-Jacquot
Armelle Fagette
Lexing Contentieux informatique
(1) TGI Paris 5-3-2015, M. X./ Facebook Inc.