L’E-sport désigne les compétitions organisées de jeux vidéo entre joueurs professionnels, diffusée sur internet.
Elles sont visées à l’article 101 de la loi pour une République numérique (1). La diffusion des tournois d’e-sport se déroule essentiellement en ligne mais cherche à occuper une place dans le paysage télévisuel.
Ces compétitions sont le plus souvent diffusées en streaming, gratuitement, sur des plateformes connues dans le monde du jeu vidéo (Twitch, O’Gaming ou bien encore Youtube). Elles demeurent peu démocratisées à la télévision.
Les débuts de l’E-sport à la télévision française
A la télévision, très peu de chaînes osent sauter le pas. Néanmoins, des acteurs comme beIN, L’Equipe 21 ou Canal + ont créé leur propre émission sur l’E-sport. Tandis que L’Equipe 21 sur TNT retransmet des matchs de football virtuel avec le célèbre jeu de simulation FIFA, le Canal Esport Club et beIN eSports font partie des premières émissions à faire l’analyse de l’ensemble de l’actualité « E-sportive ».
D’anciens joueurs professionnels reconvertis ou bien des streamers sur Internet sont devenus les principaux animateurs de ces programmes. Ces derniers espèrent capter une nouvelle audience par rapport à Internet. Les chaînes de télévision ne se sont pas lancées plus tôt. Deux contraintes viennent expliquer ce constat.
La première est que le jeu vidéo peut présenter un caractère violent pour le public et en particulier pour les mineurs. L’impossibilité de diffusion des images rendent la diffusion d’informations peu pertinente.
La seconde contrainte est l’interdiction de la publicité dissimulée régie par la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 qui fixe les conditions de la diffusion de la publicité à la télévision (2). Autrement dit, le nom du jeu vidéo, les logos des sponsors ou même celui de la console apparaissant à l’écran pourraient être qualifiés de publicité dissimulée.
Toutes ces contraintes dissuadent les directeurs de programmes de diffuser des compétitions E-sport en France.
Le système PEGI et le contrôle du CSA
PEGI est le système de classification d’âge minimal conseillé pour l’utilisation de jeux vidéo, mis en place au sein de l’Union européenne. En parallèle, le CSA peut interdire la diffusion de certaines images aux mineurs à la télévision. Appliquer ces interdictions revient à restreindre la diffusion des jeux vidéo violents ou au contenu dangereux pour les plus jeunes.
Le CSA indique que le programme diffusant des contenus violents répétitifs et interdit aux moins de 12 ans devra être diffusé à partir de 22h. Il le sera après 22h30 pour les programmes diffusant des scènes de violences « particulièrement impressionnantes » et interdits aux moins de 16 ans (3).
Or, la plupart des jeux vidéo dans l’E-sport présente des contenus violents (Call of Duy Black Ops, Counter Strike CS Go). Ces jeux ont pour point commun l’objectif d’éliminer l’équipe adverse avec des armes de guerre.
La classification PEGI est utilisée à titre de recommandation et n’interdit pas la vente aux mineurs des jeux vidéo en-dessous de l’âge conseillé. Les groupes de télévision utilisent pourtant la classification PEGI pour se conformer au contrôle du CSA.
Certains jeux classés PEGI en compétition peuvent ne pas présenter d’images choquantes pour un mineur. Ils ne pourront toutefois pas faire l’objet d’une diffusion à la télévision en raison de ce classement pris en compte par les diffuseurs et des critères retenus par le CSA.
Une volonté d’améliorer l’encadrement législatif
Le rapport d’étape (4) consacré à l’E-sport dresse plusieurs propositions pour améliorer l’encadrement de la loi.
La télévision pourrait contribuer à la démocratisation et au développement de l’E-sport en France. Notamment, le secteur évolue constamment avec un public en grande majorité mineur, à l’image de TF1 qui lance son premier tournoi sur le jeu de tir Overwatch des studios Blizzard Entertainment (5).
Le rapport propose que le CSA donne un avis explicite sur ce qui doit être diffusé parmi les images tirées des compétitions de jeux vidéo classés PEGI. Cela permettrait de retransmettre des compétitions de jeux vidéo, sans les images des scènes violentes, à des horaires de plus grande écoute.
Il est proposé que le CSA décide également des conditions pour qu’une compétition E-sport ne soit qualifiée de publicité clandestine. L’organisme applique déjà une tolérance dans le domaine sportif avec l’apparition des marques sur les maillots de joueurs par exemple.
La loi pour une République numérique ne s’est pas prononcée sur ces propositions comme le rapport l’aurait souhaité. Il est certain que les grands groupes audiovisuels demeurent dans l’attente d’une prise de position du CSA. L’E-sport n’a pas encore fini de faire parler de lui et le cadre législatif l’entourant ne cesse d’évoluer.
Marie Soulez
Rothmony Var
Lexing Contentieux Propriété intellectuelle
(1) Loi 2016-1321 du 7-10-2016, dite Loi pour une République numérique, art 101.
(2) Loi 86-1067 du 30-9-1986 relative à la liberté de communication, art. 27 et 33
(3) CSA , Jeunesse et protection des mineurs, La signalétique jeunesse, article « Quel signal pour quel contenu ? »
(4) R. Salles et J. Durain, Rapport d’étape intermédiaire, « E-sport, la pratique compétitive du jeu vidéo », 3-2016
(5) TF1.fr, Vidéo « Devenez le grand champion de la Overwatch XTRA Cup ! »