Le 26 février 2014, le Sénat a adopté, par un vote à l’unanimité, sans modification en deuxième lecture, la proposition de loi renforçant la lutte contre la contrefaçon, modifiée par l’Assemblée nationale en première lecture (1). Cette proposition succède à un rapport d’évaluation sur l’efficacité de la législation en vigueur issue de la loi 2007-1544 du 29 octobre 2007, établi par les sénateurs Laurent Béteille et Richard Yung (2). Aujourd’hui, sont attendus la promulgation du texte et ses décrets d’application.
Les principaux volets de cette loi sont l’amélioration des dédommagements civils, la clarification de la procédure du droit à l’information, l’harmonisation de la procédure de saisie-contrefaçon pour tous les droits de propriété intellectuelle, le renforcement des moyens d’action des douanes et l’harmonisation des délais de prescription pour tous les droits de propriété intellectuelle.
Amélioration des dédommagements civils. Désormais, les juridictions doivent prendre en compte distinctement les conséquences économiques négatives de l’atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subie par la partie lésées, le préjudice moral cause à la partie lésée, c’est-à-dire principalement l’atteinte à sa réputation et les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnel que l’auteur de l’atteinte aux droits a retirées de celle-ci. La nouveauté est que les juridictions peuvent s’appuyer sur un texte de loi pour prendre en compte les bénéfices indus de l’auteur de l’atteinte aux droits. Par dérogation et à la demande de la partie lésée, l’évaluation du préjudice pourra être forfaitaire, la loi prévoyant que le montant du forfait devra être supérieur au montant des redevances qui auraient été dues si l’auteur de l’atteinte avait conclu une licence.
Droit à l’information et mesures d’instruction. La loi précise que le droit à l’information introduit par la loi de 2007 peut être exercé dans le cadre d’une procédure en référé ou d’une procédure au fond. En outre, la juridiction peut ordonner d’office ou à la demande de toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon, toutes les mesures d’instruction légalement admissibles, même si une saisie-contrefaçon n’a pas été préalablement ordonnée. Enfin, l’ensemble des procédures de saisie-contrefaçon sont harmonisées.
Renforcement des moyens d’actions des douanes. La loi étend les domaines d’intervention des douanes, retenue et saisie, à tous les titres de propriété intellectuelle, dont les droits d’auteur, et à toutes les circonstances de la retenue ou de la saisie, en particulier en cas de transbordement et de transit. Toutefois, sur ce dernier point, la loi française qui est contraire à la jurisprudence actuelle de la CJUE issue du fameux arrêt Nokia (3) ne pourra pas être appliquée tant que le « Paquet Marque », à savoir la révision de la directive d’harmonisation en droit des marques et du règlement sur la marque communautaire, qui prévoit des dispositions semblables, ne sera pas adoptée.
Délai de prescription. Enfin, la loi harmonise les délais de prescription des actions visées par le Code de la propriété intellectuelle à 5 ans alors qu’actuellement les délais de prescriptions sont de 3 ou 5 ans selon les actions.
Anne-Sophie Cantreau
Virginie Brunot
Lexing Droit des marques
(1) Sénat, Doc. n° 90 du 26-2-2014.
(2) Sénat, Rapport n° 296 (2010-2011) du 9-2-2011.
(3) CJUE C-446 et C-495/09, 1-12-2011, Philips c/ Nokia Ruling.