L’utilisation d’un signe à titre de méta tag visible constitue un acte de contrefaçon de marque et concurrence déloyale.
Cas d’utilisation d’un signe à titre de méta tag visible
Dans un jugement du 17 janvier 2017 (1), le Tribunal de grande instance de Lyon condamne pour contrefaçon de marque et concurrence déloyale une société éditrice d’un site de vente en ligne d’articles de sport.
En l’espèce, le gérant d’une société éditrice d’un site de vente en ligne de matériel outdoor, de randonnée et de survie, est titulaire de la marque Inuka enregistrée en 2011 pour désigner des produits et services des classes 18, 20, 21, 22, 25, 28, 35 et 38 et titulaire du nom de domaine <inuka.com>. Par constat d’huissier, ce dernier fait constater qu’un site concurrent ressort parmi les résultats de requêtes comportant la marque Inuka. En effet, la marque Inuka apparait en tant que mot clé sur le moteur de recherche Google avec des balises titre et description du site concurrent.
La société titulaire de la marque Inuka a alors assigné la société concurrente en action en contrefaçon de marque, concurrence déloyale et pratique commerciale trompeuse.
Distinction significative entre méta-tags par le critère de visibilité
Les méta tags se définissent comme des balises contenant des informations sur une page d’un site web. Placés dans le code source de la page, les méta tags sont donc invisibles pour l’internaute.
Dans la continuité de la jurisprudence Google Adwords (2), il est rappelé que l’usage d’un signe à titre de méta tag ne peut constituer un acte de contrefaçon dès lors que ce dernier n’est pas visible par le consommateur.
Mais les juges estiment en l’espèce qu’il en va différemment. En effet, le signe apparait dans les balises de titre et de description conçues par la société concurrente, résultats visibles par le consommateur et dont les intitulés ont pour but d’orienter son comportement économique.
Ce critère de visibilité n’a cependant pas toujours été appliqué. Tel a été le cas dans une décision de la Cour de d’appel de Paris ayant jugé que l’usage d’une marque comme méta tag qu’un concurrent a inséré sur son site internet constitue un acte de contrefaçon même si la marque n’est pas visible pour l’internaute (3).
Contrefaçon par reproduction de marque dans des balises visibles
Le tribunal considère donc que cet usage dans la vie des affaires est contrefaisant de la marque Inuka dès lors que le signe est utilisé de manière à le faire apparaitre au sein de résultats visibles par le consommateur et dont les titres utilisés ont pour but d’orienter son comportement économique.
En d’autre terme, cet usage au sein des balises visibles par la société concurrente porte atteinte à la fonction de garantie d’origine de la marque.
A ce titre, le tribunal alloue 20 000 euros de dommages et intérêts à la société demanderesse.
Reproduction déloyale et fautive d’une marque dans les méta tags d’un site tiers.
Le défendeur se trouve également condamné sur le fondement de la concurrence déloyale et parasitaire au paiement de 50 000 euros de dommages et intérêts.
Pour rappel, l’action en concurrence déloyale, fondée sur l’article 1240 et 1241 du Code civil, suppose l’existence d’un comportement fautif qui :
- soit vise à créer un risque de confusion dans l’esprit du consommateur permettant un détournement de clientèle ;
- soit est de nature parasitaire consistant à se placer dans le sillage de son concurrent et profiter indument de ses investissements.
Dans cette décision, le tribunal retient un comportement doublement fautif en ce qu’il crée d’une part un risque de confusion dans l’esprit du public et d’autre part témoigne d’un profit indu tiré des investissements d’un concurrent pour bénéficier d’un meilleur référencement sur les moteurs de recherche.
Recommandations quant à l’usage d’un signe à titre de méta tag visible
A l’heure où le référencement d’un site et l’identité numérique sont essentiels, cette décision lance une piqûre de rappel aux professionnels sur les risques de l’utilisation d’une marque, nom commercial, enseigne ou dénomination sociale appartenant à un tiers. En effet si cet usage non autorisé peut favoriser un meilleur référencement, il n’en exclut pas moins une action pour contrefaçon ou concurrence déloyale.
Dans l’hypothèse inverse, il est également primordial de confier à un professionnel la surveillance de ces droits de propriété intellectuelle et engager les poursuites nécessaires pour assurer une protection effective.
Lexing Alain Bensoussan Avocats
Lexing Droit des marques
(1) TGI de Lyon, 3e ch. Cab 3C, 17-1-2017.
(2) CJUE 23-3-2010, affaires jointes C-236 à C-238/08 « Google adwords »
(3) CA Paris, 19-3-2014, n° 12/18656, ArtDesign c/ Steelnovel