Contrefaçon sur internet – Un tribunal fédéral du sud de la Floride a alloué au groupe de luxe Gucci, le 16 octobre dernier, la somme record de 144 millions de dollars de dommages et intérêts !
Le groupe Gucci avait déposé une plainte contre trois entités opérant sur des sites internet de nombreux pays, sites qui proposaient à la vente des sacs Gucci, prétendument en solde et qui intégraient pour la plupart le nom Gucci dans leur adresse, copiaient pour certains les campagnes publicitaires, les images des produits, ainsi que certains détails propres aux sites officiels de Gucci.
En plus des dommages et intérêts, le Tribunal fédéral a ordonné le transfert immédiat à la société Gucci US des noms de domaine (ou leur suspension définitive), ainsi que l’interdiction d’utiliser la marque et toute imitation de celle-ci.
Si, malheureusement, l’affaire est classique, le montant de dommages et intérêts l’est moins au regard des sommes généralement attribuées par les tribunaux français. Si, en France, les dommages et intérêts punitifs ne sont pas autorisés, le législateur a pris conscience de la nécessité de renforcer plus encore l’arsenal juridique permettant l’attribution de dommages et intérêts aux victimes de la contrefaçon. En effet, une proposition de loi a été déposée le 30 septembre 2013 au Sénat aux fins de renforcer la lutte contre la contrefaçon. Cette dernière, qui devrait être étudiée en séance publique le 20 novembre prochain, propose de renforcer les dédommagements civils accordés aux victimes de la contrefaçon.
Si la loi du 29 octobre 2007 avait déjà cet objectif, cette proposition de loi propose de renforcer les moyens à la disposition du juge. En l’état actuel du dispositif légal, le juge prend en considération :
- les conséquences économiques négatives, dont le manque à gagner subi par la victime de la contrefaçon ;
- les bénéfices réalisés par le contrefacteur ;
- le préjudice moral causé au titulaire des droits du fait de l’atteinte.
Or, la contrefaçon ayant évolué vers une dimension industrialisée, les contrefacteurs semblent désormais disposer d’une capacité de production supérieure au fabricant des produits authentiques, de sorte qu’en dépit des éventuelles condamnations prononcées, ceux-ci retirent encore un avantage économique de la contrefaçon.
Le projet de loi a pour objet de prendre en compte cette évolution et propose, en ce sens, d’ajouter à la liste existante un nouveau critère : celui des éventuelles économies d’investissements du contrefacteur. Le dispositif proposé devrait conduire à une augmentation sensible des dommages et intérêts accordés aux titulaires de droits, étant précisé qu’il serait transposé dans l’ensemble des branches de la propriété intellectuelle (propriété littéraire et artistique, dessins et modèles, brevets, obtentions végétales, marques, indications géographiques).
Affaire à suivre…
Virginie Brunot
Eve Renaud
Lexing Droit Propriété industrielle
Sénat, PLO n° 866 du 30-9-2013