Tout système de surveillance de l’activité des salariés comportant l’enregistrement de données personnelles doit faire l’objet d’une déclaration Cnil.
Cependant, la chambre sociale de la Cour de cassation apporte une nuance à cette règle s’agissant de l’utilisation d’un matériel de contrôle dont la mise en place est rendue obligatoire par une réglementation spécifique.
Dans un arrêt rendu par la chambre sociale le 14 janvier 2014 (1), la Cour de cassation a précisé qu’en vertu des dispositions du règlement européen n° 3821/85 du 20 décembre 1985 (en vigueur à l’époque des faits) (2), d’application directe, l’employeur est tenu, sous peine de sanctions pénales, d’assurer la mise en place et l’utilisation d’un chronotachygraphe (« mouchard »), instrument de mesure et d’enregistrement servant à contrôler la vitesse, l’horaire et la distance parcourue.
Les tachygraphes peuvent en outre, être équipés d’une interface avec les systèmes de transport intelligents enregistrant des données relatives à la géolocalisation.
Lorsque l’employeur est tenu, en vertu d’une réglementation obligatoire, d’assurer la mise en place et l’utilisation d’un matériel de contrôle, une absence de déclaration Cnil de l’emploi de ce matériel ne peut le priver de la possibilité de se prévaloir, à l’égard du salarié, des informations fournies par ce matériel.
Dans cette affaire, un chauffeur routier avait été licencié pour faute grave pour avoir falsifié les données du chronotachygraphe installé dans son véhicule afin de falsifier son temps de travail et donc sa rémunération. Il contestait son licenciement et affirmait que les données enregistrées par l’appareil lui étant propres et permettant de l’identifier, pouvaient être considérées comme des données personnelles, entrant dans le champ de la loi informatique et libertés du 6 janvier 1978.
La cour d’appel avait considéré le licenciement sans cause réelle et sérieuse, en retenant que les enregistrements effectués par suivi satellitaire et chronotachygraphe des déplacements du salarié ne pouvaient être opposés à celui-ci, faute de déclaration de ces dispositifs à la Commission nationale de l’informatique et des libertés. La Cour de cassation n’a pas suivi la cour d’appel.
Elle a considéré que la cour d’appel avait violé le règlement européen, d’application directe, l’employeur étant tenu, sous peine de sanctions pénales, d’assurer la mise en place et l’utilisation d’un chronotachygraphe. De sorte qu’une absence de déclaration Cnil de l’emploi de cet appareil ne saurait le priver de la possibilité de se prévaloir, à l’égard du salarié, des informations fournies par ce matériel de contrôle, dont le salarié ne pouvait ignorer l’existence.
Emmanuel Walle
Lexing Droit Travail numérique
Isabelle Pottier
Lexing Droit Informatique
(1) Cass. soc 14-1-2014 n° 12-16218.
(2) Règlement CE 165-2014 du 04 02 2014 remplaçant le règlement 165/2014 du 20-12-1985.