Dénigrement – Un agent général d’assurances, en charge de deux agences, avait décidé de démissionner afin de transmettre son activité à ses deux fils. Devant le refus des sociétés d’assurances de transmettre sa clientèle à ses fils et la transmission de celle-ci à d’autres agents, l’ancien agent général d’assurances révoqué avait mené une campagne de dénigrement à l’encontre des sociétés d’assurances qui l’employaient au moyen d’un blog, d’affiches ou d’articles de presse et de lettres circulaires adressées à la clientèle.
Une partie de la clientèle avait alors résilié son contrat et en avait souscrit de nouveaux auprès de compagnies d’assurances concurrentes.
Jugeant sa révocation abusive, l’ancien agent général d’assurances avait assigné les sociétés d’assurances en réparation du préjudice subi ainsi qu’en paiement des indemnités compensatrices de fin de mandat.
Les sociétés d’assurances avaient sollicité, à titre reconventionnel, la réparation de faits de concurrence déloyale et de dénigrement.
La Première chambre civile de la Cour de cassation a confirmé la décision de la Cour d’appel de Besançon qui avait retenu « qu’après sa révocation, [l’agent général d’assurances] avait mené, au moyen d’affiches, de lettres circulaires adressées aux assurés et de messages publiés sur un blog, une campagne de dénigrement à l’encontre [des sociétés d’assurances], qui avait conduit une partie de leur clientèle, inexactement informée, à résilier ses contrats pour en souscrire d’autres auprès d’entreprises d’assurances concurrentes, par l’intermédiaire du cabinet de courtage géré par l’épouse de leur ancien agent général », caractérisant ainsi « l’existence d’actes de concurrence déloyale et de dénigrement, a légalement justifié sa décision d’en accorder la réparation ».
Cependant, la cour d’appel avait considéré que les « les conséquences dommageables des propos relatés par les quotidiens locaux […] s’analysant en un abus de la liberté d’expression commis par voie de presse, ne relèvent pas de la responsabilité civile de droit commun et ne peuvent être réparés sur le fondement de l’article 1382 du code civil ». Dans un arrêt du 27 novembre 2013, la Cour de cassation, cassant l’arrêt d’appel sur ce point a relevé que « ces mêmes propos dénigrant l’activité des sociétés [d’assurances], avaient jeté le discrédit sur leurs produits en incitant une partie de leur clientèle à s’en détourner, ce dont il résultait un abus spécifique de la liberté d’expression », et pouvaient donc être réparés sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle et non sur le fondement de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse.
Virginie Bensoussan-Brulé
Chloé Legris
Lexing Droit pénal numérique