Le projet de loi sur les Fake news manque la cible des robots logiciels : c’est le thème de la chronique publiée par Alain Bensoussan sur son blog du figaro.fr
Le rejet par le Sénat de la proposition de loi relative à la lutte contre la manipulation de l’information confirme une évidence : en se voulant trop général, ce texte de circonstances manque sa cible. Plutôt que légiférer dans l’urgence, il faut repenser le texte en encadrant le rôle des plateformes et des robots logiciels dans la diffusion de fausses informations.
Adoptée par l’Assemblée nationale le 3 juillet après engagement de la procédure accélérée, la proposition de loi [1] relative à la lutte contre la manipulation de l’information, destinée à empêcher la diffusion artificielle de fausses nouvelles en période électorale, a été rejetée le 18 juillet par la commission de la culture et la commission des lois du Sénat [2].
Tout sauf une surprise selon Alain Bensoussan tant les critiques sont nombreuses [3] à l’encontre d’un texte concocté manifestement à la hâte depuis son annonce en janvier 2018 par le président de la République Emmanuel Macron et la ministre de la Culture Françoise Nyssen.
Cette réforme est née d’un double constat :
- l’existence de campagnes massives de diffusion de fausses informations destinées à modifier le cours normal du processus électoral par l’intermédiaire des services de communication en ligne ;
- l’insuffisance des lois existantes pour permettre le retrait rapide des contenus en ligne.
Cette tendance à légiférer à nouveau, et dans la précipitation, a fortiori dans un secteur où la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881, a mainte fois montré sa capacité d’adaptation aux innovations technologiques.
Une chose est certaine selon l’avocat, les dispositions de la loi de 1881 suffisent déjà en la matière, avec le délit de fausse nouvelle et celui de diffamation qui s’appliquent parfaitement dans le contexte qui nous préoccupe.
Quant à la question de la responsabilité des plateformes, elle a déjà été traitée par la loi «Lemaire» n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique, et celle des données personnelles par le Règlement général sur la protection des données entré en application le 25 mai 2018, ainsi que la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018.
Le texte, à vouloir être trop général, manque sa cible. L’avocat en est convaincu : au-delà des déclarations d’intention et de la création d’un juge des référés qui en pratique existe déjà, l’enjeu central réside dans la lutte contre la diffusion de fausses informations par les plateformes et les robots logiciels…
Isabelle Pottier
Directrice Études et Publications
Lire la suite sur le blog expert « Droit des technologies avancées » du Figaro : A. Bensoussan, « Diffusion de fausses informations par des robots logiciels, enjeu de la loi Fake news », le 20 juillet 2018.
Voir également l’interview d’Alain Bensoussan sur la chaîne RT France, JT du 18 juillet 2018.
[1] Il s’agit plus précisément de deux propositions de loi : l’une ordinaire et l’autre organique. La première, ordinaire (n°799 du 21 mars 2018) est applicable pendant les élections européennes, législatives, sénatoriales et les référendums ; la seconde, organique (n° 772 du 16 mars 2018), touche à l’organisation des pouvoirs publics, dédiée à l’élection présidentielle (Dossier législatif de l’Assemblée nationale) [en ligne] (pages consultées le 20 juillet 2018).
[2] V. Communiqué de presse de la Commission de la culture et la commission des lois du Sénat du 18 juillet 2018 [en ligne] (page consultée le 20 juillet 2018).
[3] V. not. Basile Ader, Fake News : une loi au mieux inutile, au pire dangereuse, Avocatparis.org, 12 juin 2018 [en ligne] (page consultée le 20 juillet 2018).