Selon les députés européens, des règles de droit civil européen de l’intelligence artificielle et de la robotique sont nécessaires.
Définie comme la « capacité d’une unité fonctionnelle à exécuter des fonctions généralement associées à l’intelligence humaine, telles que le raisonnement et l’apprentissage » dans la norme ISO 2382-28 (1), l’intelligence artificielle ne bénéficie pas d’un régime juridique qui lui est propre. Dès lors, il convient de lui appliquer le régime de droit commun qui paraît inadéquat.
Qualifiée de prochaine révolution informatique, les formes d’intelligence artificielle sont de plus en plus performantes et suscitent de nombreuses interrogations sur le plan juridique.
Dans une résolution législative contenant des recommandations à la Commission sur les règles de droit civil sur la robotique et l’intelligence artificielle adoptée le 16 février 2017, les députés européens soutiennent qu’un projet législatif est urgent pour mettre en place des normes éthiques et clarifier, notamment, les règles de responsabilité.
Le droit civil européen de l’ intelligence artificielle et de la robotique : une initiative de la Commission des affaires juridiques
Ce rapport, qui fait suite au projet de rapport de la Commission JURI, publié le 31 mai 2016, contenant des recommandations au sujet de futures règles de droit civil sur la robotique et l’intelligence artificielle (2), propose une charte sur la robotique, qui permettra de poser les bases d’une conduite éthique et déontologique.
L’objectif de la résolution sur le droit civil européen de l’ intelligence artificielle et de la robotique
Les députés européens demandent donc à la Commission de présenter une proposition de directive sur les règles de droit civil sur la robotique en suivant les recommandations de l’annexe de la résolution, afin d’assurer un standard de sûreté et de sécurité.
L’objectif du législateur est d’examiner les conséquences et les effets juridiques de la robotique et de l’intelligence artificielle, sans pour autant ralentir l’innovation.
Les impacts des robots et de l’ intelligence artificielle
Dans son introduction, le Parlement européen rappelle les enjeux du développement de la robotique et de l’intelligence artificielle ou « machines intelligentes et autonomes, dotées de la capacité d’apprendre et de prendre des décisions de manière indépendante ».
La résolution rappelle que les ventes de robots ont augmenté en moyenne de 17% par an, et qu’elles ont connu, en 2017, leur plus forte augmentation annuelle, s’élevant à 29%.
Toutefois, les enjeux ne sont pas seulement économiques. La résolution insiste sur le fait que cela impacte la société dans son ensemble, et liste les impacts éthiques, sociaux, environnementaux et juridiques des robots dotés d’intelligence artificielle.
La résolution précise que « plusieurs pays, tels les Etats-Unis, le Japon, la Chine et la Corée du Sud, envisagent des mesures réglementaires dans le domaine de la robotique et de l’intelligence artificielle, et qu’ils ont même déjà pris certaines mesures en ce sens ».
La résolution soutient notamment qu’il est nécessaire de créer une définition acceptée par tous des notions de robot et d’intelligence artificielle et que ces innovations devraient, dès l’étape de la conception, préserver la dignité et l’autodétermination de la personne humaine.
Les recommandations pour un droit civil européen de l’ intelligence artificielle et de la robotique
Le Parlement européen recommande dès lors à la Commission d’établir :
- une définition européenne commune des catégories de robots autonomes et intelligents ;
- un système d’immatriculation des robots avancés :
- un instrument en matière de responsabilité des robots et de l’intelligence artificielle dans les cas autres que les dommages matériels ;
- une assurance robotique ;
- un fond de garantie ;
- l’interopérabilité des robots autonomes ;
- l’accès au code source, données d’entrées et aux détails de construction, notamment pour les enquêtes de responsabilité ;
- une charte sur la robotique.
Cette charte robotique pourrait établir les principes éthiques fondamentaux devant être respectés dès la phase de conception et de développement, dans le domaine de la robotique et l’intelligence artificielle.
La charte est composée des éléments suivants :
- le code de conduite éthique pour les ingénieurs en robotique ;
- le code de déontologie pour les comités d’éthique de la recherche ;
- la licence pour les concepteurs ;
- la licence pour les utilisateurs.
Le Parlement européen formule également une demande à la Commission relative à la possibilité, à long terme, de créer un statut juridique spécial pour les robots, afin de clarifier la responsabilité en cas de dommages. La responsabilité est, en effet, l’objet principal des recommandations. La résolution fait, notamment, un point sur les véhicules autonomes.
Le Parlement propose à la Commission de créer une agence européenne chargée de la robotique et de l’intelligence artificielle pour fournir l’expertise technique, éthique et réglementaire nécessaire pour soutenir les acteurs publics.
Pour conclure, il convient de relever que la Commission n’a aucune obligation de suivre les recommandations du Parlement européen. En cas de refus, la Commission devra toutefois exposer les motifs.
Marie Soulez
Julie Langlois
Lexing Propriété intellectuelle Contentieux
(1) Norme ISO/IEC 2382-28:1995, Technologies de l’information — Vocabulaire — Partie 28 : Intelligence artificielle — Notions fondamentales et systèmes experts, révisée par ISO/IEC 2382 :2015.
(2) Règles de droit civil sur la robotique : Résolution du Parlement européen du 16 février 2017 contenant des recommandations à la Commission concernant des règles de droit civil sur la robotique (2015/2103(INL) – P8_TA-PROV(2017)0051)