Economie juridique
Le générateur de mots clés de Google pris en faute une nouvelle fois
Une procédure engagée par un syndicat professionnel et 28 sociétés
En novembre 2005, la société Google France a une nouvelle fois été assignée au titre de l’exploitation commerciale de son générateur de mots clés dénommé « adwords », par lequel elle propose aux annonceurs de réserver des mots clés qui permettront l’affichage de liens commerciaux vers leur site internet, alors que des noms de marques figurent parmi les mots clés proposés.
Ainsi, le Groupement Interprofessionnel des Fabricants d’Appareils d’Equipements Ménagers (GIFAM), a constaté que Google exploitait à titre de mots clés, sans leur accord, les marques de 28 de ses adhérents.
Les 28 sociétés se joignent alors au GIFAM pour demander au Tribunal de grande instance de Paris de condamner Google à leur payer, à chacune 50 000 € au titre de la contrefaçon, 30 000 € pour actes de parasitisme, 30 000 € pour atteinte à leurs marques, 20 000 € pour usurpation de leur dénomination sociale (sauf 2 sociétés), 30 000 € pour atteinte à leur nom de domaine (sauf 7 sociétés), 30 000 € pour publicité mensongère, 50 000 € pour faute civile et 20 000 € au titre de l’article 700 du Nouveau code de procédure civile. Une expertise est également demandée par le GIFAM pour chiffrer ses préjudices ainsi que la publication de la décision.
L’enjeu
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L’action menée par le syndicat professionnel dans l’intérêt collectif de ses membres et par certains de ses adhérents s’avère peu efficace pour indemniser chaque victime individuellement.
Qui se solde par une lourde condamnation collective
Les demandes de réparation formulées à l’encontre de Google atteignent la somme totale de 6 310 000 €.
Cette fois, le Tribunal ne retient pas, à l’encontre de Google, la contrefaçon de marque ni les autres atteintes aux signes distinctifs invoquées, en considérant que ce sont les annonceurs qui décident de mettre en relation les signes distinctifs et leur site internet et non pas Google. La responsabilité civile du moteur de recherche est cependant retenue pour ne pas procéder au contrôle des droits des annonceurs sur les mots clés et pour publicité mensongère (1).
Le tribunal apprécie souverainement l’étendue des dommages invoqués et accorde, au GIFAM, 30 000 € pour l’atteinte aux intérêts collectifs de ses adhérents, 30 000 € pour l’atteinte à l’image de ses adhérents et à chacune des sociétés demanderesses, 10 000 € pour atteinte à leur image. Il ordonne également la publication de la décision à concurrence de 25 000 €.
Le moteur de recherche est donc condamné à payer une somme de 340 000 € de dommages et intérêts, 20 000 € pour frais de procédure et 25 000 € de frais de publication, soit 385 000 € au total, ce qui constitue à ce jour une des plus lourdes condamnations encourrues par Google en la matière, sous réserve d’appel. Cependant, chaque société demanderesse obtient individuellement une faible indemnisation de ses dommages (10 000 €), alors que les demandes respectives s’élevaient, pour les plus élevées d’entre elles, à 230 000 €.
Les conseils
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Les demanderesses ne semblent cependant avoir justifié ni de l’existence ni de l’étendue de leurs dommages respectifs, ce qui leur aurait certainement permis d’obtenir une réparation plus significative.
TGI Paris, 3ème ch. 3ème sect., 12/07/2006, GIFAM et 28 sociétés c. Google France
Bertrand Thoré
Directeur du Département Economie juridique
bertrand-thore@lexing.law
Paru dans la JTIT n°57/2006