Pour se faire connaître, un candidat aux élections municipales n’a pas d’autre choix que de se lancer dans une campagne de communication. Cette dernière ne doit cependant pas consister à faire de la « promotion publicitaire ».
Communication et promotion partagent un objectif commun : séduire et convaincre les électeurs de voter pour un candidat. Mais en matière électorale, la publicité commerciale est interdite. Les collectivités sont également concernées, dès lors qu’un de leurs élus est candidat.
Le rôle des collectivités en période électorale
Le contenu d’un magazine municipal doit rester « informatif » et être « consacré à des projets, manifestations ou événements intéressant la vie locale » (1).
Ainsi, une collectivité publique peut maintenir son site en ligne à condition de ne participer en aucun cas à la propagande des candidats. En effet, le site ne doit avoir pour vocation qu’une information générale et dépersonnalisée sur la collectivité, sans rapport avec les échéances électorales à venir.
Il en va de même du contenu de toute publication sur internet par une collectivité. Il ne doit pas comporter de message publicitaire afin d’éviter de se voir reprocher le financement de la campagne électorale d’un candidat (art. L. 52-8).
Une collectivité ne peut donc, en période électorale :
- placer des liens sur les sites des candidats ou listes ;
- héberger le site d’un candidat ;
- faire bénéficier les candidats de ses moyens techniques.
Par ailleurs, les collectivités qui disposent d’outils de discussion qui permettent un échange avec les administrés risquent de voir ces outils détournés de leur fonction pour devenir des lieux de diffusion de propagande.
Pour prévenir ces risques, il est donc conseillé aux collectivités recourant à de tels outils :
- d’adopter une charte d’utilisation,
- de recourir à une modération des messages et, le cas échéant,
- de geler ces outils durant la veille et le jour de l’élection.
Les interdictions générales en matière de propagande électorale
Quel que soit le support utilisé, la communication en période pré-électorale et électorale est particulièrement encadrée.
Ainsi, le Code électoral impose plusieurs restrictions en matière de communication qui, selon les cas, s’appliquent :
- pendant les 6 mois précédant le 1er jour du mois où l’élection est organisée ; soit, en ce qui concerne les municipales de 2020, depuis le 1er septembre 2019 ;
- à partir de la veille du scrutin, à zéro heure, soit les 14 et 21 mars 2020, le décret du 4 septembre 2019 ayant fixé les 2 tours au 15 et 22 mars 2020 ;
- jusqu’à la fermeture du dernier bureau de vote, soit les 15 et 22 mars au plus tard à 20 heures.
Pendant les périodes mentionnées, il est interdit :
- d’utiliser à des fins de propagande électorale « tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle » ;
- d’organiser une « campagne de promotion publicitaire des réalisations ou de la gestion d’une collectivité » (art. L. 52-1).
Toute infraction aux dispositions de l’article L. 52-1 est passible d’une amende de 75 000 euros (art. L. 90-1).
La seule dérogation autorisée est la présentation par un candidat du bilan de la gestion de son mandat ; à condition toutefois de ne pas être financée sur des fonds publics ni bénéficier des moyens matériels et humains mis à la disposition des élus dans le cadre de l’exercice de leur mandat (art. L. 52-8).
La jurisprudence
Ainsi, ne sont pas seulement prohibées les actions de communication institutionnelle mettant directement et personnellement en valeur un candidat précis, mais également toutes les communications sur la gestion de la collectivité qui pourraient avoir un impact électoral en faveur de la municipalité sortante.
A la lecture des différentes décisions rendues par le conseil d’Etat (2), l’objectivité et la neutralité doivent être de mise. Les messages délivrés doivent être de nature strictement informative et justifiés par l’actualité locale.
De même, parmi les autres interdictions générales qui s’appliquent la veille et le jour du scrutin figure celles de :
- porter à la connaissance du public un élément nouveau de polémique électorale à un moment tel que ses adversaires n’aient pas la possibilité d’y répondre avant la fin de la campagne électorale (art. L. 48-2).
- diffuser ou de faire diffuser par tout moyen de communication au public par voie électronique tout message ayant le caractère de propagande électorale (art. L. 49) sous peine d’une amende de 3 750 euros (art. L. 89) ;
- procéder, par un système automatisé ou non, à l’appel téléphonique en série des électeurs afin de les inciter à voter pour un candidat (art. L. 49-1).
Les moyens de communication interdits
Les interdictions et restrictions prévues en matière de propagande électorale sont applicables à « tout message ayant le caractère de propagande électorale diffusé par tout moyen de communication au public par voie électronique » (art. L. 48-1).
Elles peuvent s’appliquer à tous les procédés de publicité couramment employés sur internet tel que l’achat de liens sponsorisés ou de mots-clefs ou le référencement payant. Les candidats ne peuvent donc pas y recourir pendant cette période.
A titre d’exemple, le Conseil Constitutionnel considère que « le référencement commercial d’un site à finalité électorale sur un moteur de recherche sur internet avec pour finalité d’attirer vers lui des internautes qui effectuent des recherches, même dépourvues de tout lien avec les élections, est contraire aux dispositions de l’article L. 52-1 du Code électoral » (3).
Sites Internet et réseaux sociaux, la veille du scrutin à zéro heure (soit les vendredis 13 mars pour le premier tour et 20 mars pour le deuxième tour, à minuit), les candidats doivent s’abstenir de toute communication électorale, à savoir :
- ne plus publier de documents revêtant un caractère de propagande électorale sur leur site ;
- bloquer les discussions entre internautes se déroulant sur leur site et blog ;
- ne plus adresser de newsletters aux abonnés du site.
Le Conseil d’Etat rappelle que les sites Internet ou blogs des candidats peuvent rester accessibles en ligne. En revanche, le fait de modifier le contenu du site la veille et le jour du scrutin peut s’analyser comme une nouvelle communication (4).
Les recommandations du Ministère de l’intérieur pour les élections municipales 2020
Pour être complet, signalons le vade-mecum que vient de publier le Ministère de l’intérieur, à destination des candidats. Il se décline en deux guides : l’un pour les communes de moins de 1000 habitants, l’autre pour celles de 1000 habitants et plus.
Chacun recense de manière exhaustive l’ensemble des règles relatives aux élections municipales et communautaires de 2020 :
- démarches préalables à l’acte de candidature ;
- constitution du dossier de candidature ;
- dépôt, enregistrement et modalités de retrait des candidatures ;
- déroulement de la campagne électorale ;
- propagande électorale ;
- dépouillement des votes et proclamation des résultats ;
- réclamation et contentieux ;
- démarches obligatoires après le scrutin ;
- financement des élections municipales.
Outre les aspects relatifs à l’organisation elle-même des élections locales, ce vade-mecum constitue un outil particulièrement complet en ce qui concerne la communication des collectivités.
A première vue, ces conseils s’adressent aux candidats ; mais à bien y regarder, ils visent aussi tous les acteurs parties prenantes aux élections municipales 2020 ; des collectivités aux citoyens en passant par les partis et groupements politiques et les préfectures .
Alain Bensoussan,
Mél : alain-bensoussan@lexing.law
L.D. : +33 (0)6 19 13 44 46
(1) CE, 29-7-2002, n° 239844, Elections municipales de Chelles.
(2) CE, 3-12-2014, n° 382217, Elections municipales de La Croix Saint-Leufroy (Bulletin municipal présentant de manière avantageuse les réalisations de la commune au cours du semestre précédent) ; CE, 4-7-2011, n° 338033, Elections régionales d’Ile-de-France (campagne d’affichage massive et publication d’encarts dans la presse écrite et sur Internet).
(3) Cons. const., 8-12-2017, décis. 2017-5026, AN Alpes-Maritimes (3e circ.). Dans le même sens, CE, 25-2-2015, n° 382904, Elections municipales de Palavas-les-Flots ; CE, 13-2-2009, n°317637, Elections municipales de Fuveau.
(4) CE, 8-7-2002, n° 239220, Elections municipales de Rodez ; CE, 5-6-2015, n° 383197, Elections municipales de Terre-de-Haut (Guadeloupe).