Fraude fiscale : censure partielle de la loi – Une vigilance accrue doit être observée dans la mesure où, malgré la censure de certains de ses articles par le Conseil constitutionnel, la loi du 6 décembre 2013 renforce considérablement les sanctions en matière de fraude fiscale.
Dans sa décision du 4 décembre 2013, le Conseil constitutionnel a jugé conforme à la constitution (1) :
- la faculté pour certaines associations de lutte contre la corruption de mettre en mouvement l’action publique au titre des droits reconnus à la partie civile (art. 1er) ;
- la réduction voire l’exemption des sanctions encourues par les auteurs ou complices du délit de blanchiment, de corruption ou de trafic d’influence, ayant avertis l’autorité administrative ou judiciaire, et ainsi permis de faire cesser ou d’éviter la réalisation de l’infraction et/ou d’identifier les autres auteurs ou complices de l’infraction (art. 5) ;
- l’alourdissement des peines du délit de fraude fiscale aggravé commis en bande organisée ou facilité au moyen, notamment, d’un compte ouvert à l’étranger (art. 9) ;
- le recours aux pouvoirs spéciaux d’enquête applicables à la délinquance organisée concernant les délits de fraude fiscale et douanière aggravés, les délits de corruption et de trafic d’influence (art. 66) ;
- la limitation des cas dans lesquels l’administration fiscale est en mesure de transiger sur les amendes fiscales ou les majorations d’impôts (art. 15) ;
- l’instauration de sanctions en cas de défaut de réponse ou de réponse partielle à une mise en demeure de produire certains éléments déclaratifs relatifs aux actionnaires, aux filiales et aux participations (art. 61) ;
- la création d’un procureur de la république financier doté d’une compétence concurrente de celle des autres procureurs (art. 65).
De même, en matière de de fraude fiscale, les administrations fiscale et douanière pourront utiliser les documents ou informations qu’elles reçoivent, quelle que soit leur origine, y compris illégale, mais ne pourront s’en prévaloir lorsque ces documents ou informations ont été obtenues dans des conditions déclarées ultérieurement illégales par le juge (art. 37, 39).
En revanche, il a jugé contraire à la constitution :
- l’instauration d’un maximum de la peine encourue par des personnes morales en proportion du chiffre d’affaires (art. 3 et 44) ;
- la possibilité pour les administrations fiscale et douanière de demander au juge l’autorisation de procéder à des visites domiciliaires sur le fondement de documents, indépendamment de leur origine, y compris illégale (art. 38 et 40) ;
- l’ajout à la liste des Etats et territoires non coopératifs en matière fiscale les Etats n’ayant pas conclu avec la France ou n’envisageant pas de conclure une convention d’assistance administrative incluant l’échange automatique des documents (art. 57) ;
- la possibilité de recourir en matière de fraude fiscale à une garde à vue de 96 heures avec report de la présence de l’avocat à la 48e heure (art. 66) ;
- la présence du ministre du budget lors de certains travaux des commissions parlementaires (art. 15 et 16).
Le Conseil constitutionnel a, également, censuré d’office l’article 29 qui visait à porter à 60 jours, au lieu de 30, le délai prévu à l’article 1844-5 du Code civil pendant lequel les créanciers peuvent faire opposition à la dissolution (TUP) de la société, dans la mesure où cet article 29 ne présentait pas de lien avec l’objet de la loi. La loi ainsi partiellement censurée a été promulguée le 6 décembre 2013.