Les injures non publiques ne peuvent être réparées sur le fondement de l’article 1382 du Code civil.
Dans le cadre d’un litige portant sur une servitude de passage dans le cadre de travaux, l’usufruitier et le nu-propriétaire de la parcelle grevée de servitude avaient entreposé des gravats et commis diverses dégradations, pour dissuader la société de travaux de passer sur leur terrain.
La société de travaux, pour démontrer le préjudice qu’elle subissait, a fait intervenir un huissier de justice pour constater ces agissements. Alors que l’huissier procédait à ses constatations, le nu-propriétaire avait injurié l’entrepreneur devant l’huissier.
L’entreprise de travaux a alors assigné, sur le fondement de l’article 1382 du Code civil, l’usufruitier en réparation de son préjudice du fait de l’obstruction de la servitude, d’une part, et en réparation du préjudice qu’il subissait du fait des injures constatées par l’huissier, d’autre part.
La Cour d’appel de Nîmes, par arrêt du 7 août 2014, avait considéré que le comportement insultant et outrageant du défendeur ne relevait pas des dispositions de la loi du 29 juillet 1881 et l’avait condamné, sur le fondement de l’article 1382 du Code civil, à payer au demandeur la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts et à la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
La 3e chambre civile de la Cour de cassation a cassé l’arrêt, jugeant que « les abus de la liberté d’expression telles que les injures non publiques soumises au régime de la loi du 29 juillet 1881 et réprimés par l’article R. 621-2 du Code pénal ne peuvent être réparés sur le fondement de l’article 1382 du Code civil ; que l’action civile en réparation du préjudice causé par l’infraction d’injure non publique est soumise à la prescription édictée par l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881 » (1).
Comme les autres infractions de presse, l’injure non publique ne peut donc être réparée sur le fondement de la responsabilité délictuelle de droit commun de l’article 1382 du Code civil.
Le véritable enjeu de cette qualification est sans doute l’application des dispositions de l’article 65 de la loi du 29 juillet 1881 sur la prescription de l’action publique. Ainsi, la Cour de cassation réaffirme que le principe selon lequel les actions sur le fondement de l’injure non publique sont, elles aussi, soumises à la courte prescription de 3 mois applicable en matière de d’infractions de presse.
Virginie Bensoussan-Brulé
Chloé Legris
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(1) Cass. 3e civ. 14-1-2016 n°14-26313.