Les arrêts rendus par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) le 23 mars 2010 dans les affaires dites « Google » ont posé le principe de la limitation de la responsabilité des moteurs de recherche en retenant que le prestataire d’un service de référencement sur internet qui stocke, en tant que mot clé, un signe identique à une marque et organise l’affichage d’annonces à partir de celui-ci, ne fait pas, lui-même, un usage de ce signe dans la vie des affaires (1).
La responsabilité des prestataires de référencement ne peut donc être engagée qu’à la condition alternative :
– d’avoir joué « un rôle actif de nature à leur confier une connaissance ou un contrôle des données stockées » ou
– de ne pas avoir promptement retiré ou rendu inaccessibles les données stockées après avoir pris connaissance de leur caractère illicite.
Sans surprise, la Cour de cassation a fait une stricte application de la solution prononcée aux termes de quatre arrêts en date du 13 juillet 2010, infirmant les arrêts rendus par les Cours d’appel ayant retenu la responsabilité du moteur de recherche dans le cadre de son activité de référencement payant (2).
La mise en œuvre de la responsabilité des moteurs de recherche suppose donc une notification préalable, telle que visée par l’article 6 de la Loi pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN).
Si la responsabilité du moteur de recherche ne peut être poursuivie sur le fondement du droit des marques, tel n’est pas le cas de celle de l’annonceur qui utilise un mot clé identique à une marque antérieure et qui fait, ainsi un usage de ce signe dans la vie des affaires au sens de la réglementation.
La mise en œuvre de la responsabilité de l’annonceur reste conditionnée par la démonstration, non seulement de l’identité ou de la similarité des produits et services en cause, mais également d’une atteinte à la fonction essentielle de la marque que constitue l’identification d’origine des produits et services proposés.
L’atteinte à la fonction d’identification d’origine de la marque résulte, dans ce cas, d’un usage dans des conditions telles qu’il ne permet pas – ou seulement difficilement – à l’internaute de savoir si les produits ou les services visés par l’annonce commerciale proviennent du titulaire de la marque, d’une entreprise économiquement liée à celui-ci ou, au contraire, d’un tiers.
Si les conclusions (3) rendues par l’Avocat général de la CJUE, le 9 décembre 2010, dans l’affaire dite « L’Oréal e.a. », sont suivies par la Cour de justice de l’Union européenne, la solution retenue pour les moteurs de recherche pourrait être étendue aux exploitants de places de marché électroniques dont les utilisateurs sont susceptibles d’enfreindre le droit des marques en reproduisant ou imitant ces dernières sans autorisation du titulaire pour désigner des produits ou services identiques à ceux protégés.
Affaire à suivre donc…
(1) CJUE 23 mars 2010 C-236/08 à C-238/08
(2) Cass. com. 13 juillet 2010 n°05-14.331 ; Cass. com. 13 juillet 2010 n°06-15.136 ; Cass. com. 13 juillet 2010 n°06-20.230 ; Cass. com. 13 juillet 2010 n°08-13.944
(3) CJUE 9 décembre 2010 conclusions avocat général C-324/09