La loi ASAP d’accélération et de simplification de l’action publique est une réforme importante pour la commande publique.
Suite à la décision n°2020-807 DC du 3 décembre 2020 par laquelle le Conseil constitutionnel a validé les dispositions de la loi « ASAP », celle-ci a été publiée le mardi 8 décembre 2020 au Journal Officiel.
De nouveaux seuils pour les marchés de travaux
La première mesure phare est le redressement du seuil de dispense de publicité et de mise en concurrence à 100 000 euros HT pour les marchés de travaux, prévu à l’article 142. Jusqu’au 31 décembre 2022, les acheteurs pourront passer des marchés de travaux :
- sans publicité ni mise en concurrence,
- dont la valeur estimée est inférieure à 100 000 euros HT.
Cet article renvoie également aux lots de marchés de travaux dont la valeur estimée est inférieure à ce même montant ; pourvu que le montant cumulé des lots passés sans procédure ni mise en concurrence n’excède pas 100 000 euros HT.
A noter que ces dispositions s’appliquent aux marchés pour lesquels :
- une consultation est d’ores et déjà engagée ou
- un avis d’appel à la concurrence est envoyé.
La seconde mesure significative est celle prévue à l’article 132. Elle complète la deuxième partie du Code de la commande publique par l’ajout d’un Livre VII « Dispositions relatives aux circonstances exceptionnelles ».
En vertu de ces nouvelles dispositions, le pouvoir réglementaire aura désormais la faculté de mettre en œuvre des mesures dérogatoires en cas de circonstances exceptionnelles – nouveaux articles L. 2711-1 à L. 2711-2 du Code de la commande publique.
A titre d’illustration, le nouvel article L. 2711-5 prévoit la possibilité pour l’acheteur public de prolonger par avenant la durée d’exécution d’un marché lorsque celui-ci arrive à son terme durant une période de circonstances exceptionnelles.
Le motif d’intérêt général : une nouveauté de la loi ASAP
Enfin, et c’est probablement la mesure qui a fait couler le plus d’encre, l’article 131 prévoit désormais la possibilité pour les acheteurs de recourir à la passation d’un marché sans publicité ni mise en concurrence lorsqu’un motif d’intérêt général le justifie. L’article L. 2122-1 – qui prévoit les motifs de passation de marché sans publicité ni mise en concurrence – est ainsi complété par l’ajout des termes : « ou à un motif d’intérêt général ».
L’article 131 s’inscrit également dans une volonté d’élargissement d’accès aux marchés publics. A cet effet, il modifie l’article L. 2141-3 du Code de la commande publique ; il ouvre l’accès aux marchés publics aux entreprises bénéficiant d’un plan de redressement judiciaire.
Dans le même sens, l’article 131 renforce la présence des PME et des artisans dans les marchés globaux. Il oblige les acheteurs publics à tenir compte, dans les critères d’attribution de ces marchés, de la part confiée aux PME et aux artisans. Cette part minimale sera fixée par voie réglementaire.
A titre plus subsidiaire, l’article 140 modifie l’article L. 2512-5 du Code de la commande publique en ajoutant :
- les marchés ayant pour objet « la représentation légale d’un client par un avocat dans le cadre d’une procédure juridictionnelle… »
- les services de consultations juridiques lorsqu’il existe des signes tangibles et de fortes probabilités que la question sur laquelle porte la consultation fera l’objet d’une telle procédure
à la liste des services juridiques non soumis aux règles de préparation et de passation des marchés publics.
Crise sanitaire oblige, la loi ASAP s’inscrit dans la volonté globale :
- d’allégement de la procédure de passation et
- d’accessibilité de la commande publique rendue nécessaire.
Enfin, il convient de noter que la loi ASAP comporte diverses dispositions touchant à :
- la concertation du public en matière environnementale, notamment l’article 44 permettant la consultation du public pour certains projets par voie électronique plutôt que par une enquête publique ;
- l’intégration du PLU dans la liste des plans et programmes faisant l’objet d’une évaluation environnementale systématique (art. L. 104-1 du Code de l’urbanisme).
François Jouanneau
Lexing Droit public